La rente est-elle anti-économique ?

L’usage courant stigmatise la «rente». Il condamne la rente car elle serait à l’abri de la concurrence, qu’elle serait donc en dehors de l’échange normal et équitable du marché.
Il faudrait donc introduire de la concurrence pour détruire cette rente immorale…

Dans son livre «Le capital au XXI° siècle», Thomas Piketty explique ce qu’est la rente, et ce qu’elle a toujours été.
La «rente» est tout simplement le rendement du capital.
Dans les romans de Balzac ou de Jane Austen, ou autres, lorsqu’un personnage a une rente de 50 000 francs (ou livres…), le taux de rendement étant ordinairement de 5%, cela signifie qu’il possède un capital de 1 000 000 de francs qui produit cette rente.
1 000 000 x 5% = 50 000.
Que l’on introduise ou intensifie la concurrence n’y change rien, un taux de rendement de 5% sur un capital d’1 million produit une rente de 50 000.

En fait, la péjoration de la rente est l’expression d’un jugement moral (pour des raisons historiques particulières), et non d’une appréciation économique. Les «rentes de situation»  décriées relèvent de cette péjoration, elles profitent d’un avantage commercial mais ne concernent pas le capital en tant que tel.
La mise en concurrence ne réduira donc en rien la rente.

4 commentaires sur “La rente est-elle anti-économique ?

  1. Bons et opportuns rappels de votre part.
    Hormis les communistes principalement, personne ne s’en prenait à cet outil d’épargne et d’investissement dans l’économie réelle.
    Mais nos financiers voici quelques décennies ont trouvé que des rendements de l’ordre de 2 à 5 % en moyenne étaient insuffisants : pour capter de la clientèle en quête de placements, pour leur superbe égo et pour leur rémunération « au résultat » (à court terme).
    Car en spéculant à court terme sur tout et n’importe quoi avec les mêmes fonds il était possible d’atteindre des rendements à court terme bien supérieurs … à deux chiffres.
    Puis on inventa des produits dérivés pour accélérer liquidé, rotation des capitaux, renvoi du risque sur les gogos, acheter les politiques en finançant leurs fantasmes et leur électorat, toujours à court terme.
    Au prix de la déréglementation et de l’endettement public et privé incontrôlés. Au prix encore du dépeçage du tissu industriel occidental. Au prix du désinvestissement public et privé et du sabordage des services publics.
    La rente reste produit d’épargne mais n’est plus en grande partie consacrée à l’investissement productif mais à la spéculation … et là ça ne colle plus.

    Bien à vous

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  2. J’entends bien dans votre article une certaine contestation de ce que j’écris. Cependant, je n’ai jamais dit que je condamnais la rente, et en particulier la rente immobilière. Je dis plutôt que je suis scandalisé par le fait que cette rente immobilière soit quasiment exemptée d’impôts et de taxes alors même que le travail salarié est assommé sous les pressions fiscales et sociales ! Entendons nous bien, je joue en bourse, je n’ai donc aucune raisons, à priori de condamner le bénéfice, la pus valus ou que sais je mais je m’étonne que dans notre pays ces revenus boursiers et immobiliers ne soient pas frappés par la même taxation que le travail ! Et je m’en étonne d’autant plus que le gros problème de notre pays, c’est le : chômage !
    Nous ne pourrons pas assurer notre modèle social, ni notre prétendument égalité, si nous assassinons nos jeunes non qualifiés en leur interdisant à jamais le chemin du travail parce qu’ils coutent trop cher ! Petit rappel, les salariés de foxcom (en Chine) ont fait grève pour gagner 200 euros par mois ! Peut on imaginer que nos enfants et petits enfants soient en permanence soumis à cette pression là tandis que les rentiers de l’immobilier coulent des jours heureux dans notre pays ?
    Mon père a acheté une maison 120000 francs il y a quarante ans. Elle devait durer 40 ans selon ses constructeurs… quarante ans plus tard cette même maison se vend sur le marché plus de 1 million d’euros ! Est ce normal, et si oui, (même en tenant compte de l’inflation) ne faut il pas taxer les plus valus qu’elle a générée, alors même que son propriétaire vit de revenus sociaux versés par les salariés actuels ?
    On condamne souvent les actionnaires (qui pourtant investissent, eux, dans les entreprises), que faut il penser aujourd’hui de la situation de l’immobilier, et que faut il en déduire sur les ajustements à effectuer en matière de fiscalité, alors même que justement la fiscalité des actions a très largement été alourdie ces dernières années ?

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    1. Vous vous trompez complètement : je ne pensais pas à vous, je ne sais d’ailleurs pas ce que vous publiez sur ce sujet précis.
      Moi-même je n’étais pas clair, je connaissais la rente dans les romans de Balzac par exemple, où elle était un revenu… sans que je sache très bien le rapport qu’elle avait avec le capital.

      Non, c’est le livre de Thomas Piketty qui éclaircit les choses sur ce point comme sur bien d’autres. C’est un livre d’histoire, de revenu, de production, de capital, d’inégalités ; revenu du travail et revenu du capital… d’évolution de ces revenus, production, capital, inégalités, mais fondé sur des statistiques qui remontent pour les plus anciennes au XVIIIème pour la France et le Royaume-Uni.
      C’est un livre qui explique notre situation économique et sociale dans son évolution, aussi loin que remontent les chiffres qui permettent de la mesurer.
      C’est le premier livre aussi clair sur la question, je vous le recommande. C’est un gros livre, 1000 pages, mais facile à lire, très didactique : après l’avoir lu on sait de quoi on parle…

      Par contre, quand vous dites, « la rente n’est plus dirigée vers la production mais vers la spéculation », vous vous trompez : « la rente » n’est pas dirigée, elle est reçue. C’est l’investissement qui est dirigé vers la spéculation plutôt que vers la production.

      Bien à vous.

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  3. Et d’ailleurs je rejoins le propos de Gaëtan Calmes : la rente n’est plus dirigée vers la production mais vers la spéculation, l’immobilier français en est la plus triste et désastreuse illustration ! Acheter un terrain et des murs, sans rien avoir fait ou produit d’autre que cet achat, sans avoir pris aucun risque, ne devrait en aucun cas permettre de gagner le moindre argent, surtout quand, à priori le bien acheté est dégradable ! L’immobilier est un des seuls cas où le produit d’occasion peut couter plus cher que le produit neuf… Logique économique, peut être ; rente de situation (j’ai bien dit : rente) : surement ; scandale social : évidemment…

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