LA RÉFORME DU SALARIAT


À la recherche de la réforme…

Je critique sévèrement et systématiquement les analyses et solutions qui nous sont proposées, parce qu’elles ne prennent pas en compte le stade d’évolution de notre société, qu’elles confondent souvent le système social, et le système économique…
Le système social est obsolète, il ne fonctionne plus, il n’est plus adapté au stade de notre évolution, il n’a plus l’efficience qui nous permettrait de maîtriser notre insertion dans le monde actuel.
Les solutions proposées dans le cadre de cette obsolescence sont vouées à l’échec.
Pour pouvoir envisager des solutions viables, il faut tenir compte de ces évolutions fondamentales.

La critique ne suffit pas, aussi vais-je tenter de mettre ces évolutions en perspective, pour ensuite faire des propositions qui puissent être viables.

Je vais d’abord développer l’analyse de 12 points déterminants.
Puis je proposerai une réforme en 3 points.

Je me lance…


1 – D’où viennent les systèmes économique et social actuels ?

Le capitalisme qui est maintenant le système économique universel serait né paraît-il dès le Moyen-Âge en Europe sous la forme du commerce médiéval.

Les premiers capitalistes européens sont des marchands qui règlent leurs paiements par « lettres de change », moins dangereuses que le transport des métaux précieux.
C’est donc logiquement que se développe parallèlement au capitalisme commercial, le capitalisme financier… qui permet donc le développement du premier.

À travers le monde d’autres formes de capitalisme commercial sont développés dès l’Antiquité par les Phéniciens, les Grecs, les Carthaginois, les Romains, et à l’époque féodale, sous la dynastie Ming en Chine par exemple…

Mais celui qui nous intéresse, c’est le capitalisme occidental, le nôtre, qui est parvenu à dominer le monde.
L’existence d’autres capitalismes dans d’autres parties du monde, qui ne se sont pas développés, démontre une spécificité du capitalisme occidental…
Ce capitalisme occidental a bien-sûr des caractères particuliers : bourses, foires, l’éthique protestante…, mais la différence essentielle n’est pas là.

La différence essentielle est l’invention occidentale du salariat.
Le salarié est un individu autonome, il est propriétaire de sa force de travail.
Il est d’abord autonome par rapport à sa famille, il échappe à l’emprise de sa famille.
Socialement, le développement du salariat multiplie le nombre des salariés autonomes… que pourront employer les capitalistes, alors que les autres capitalismes non-occidentaux, aussi bien antiques que féodaux, s’appuyaient sur des systèmes sociaux serviles ou parentaux, résultat : ils ne sont pas développés.

C’est le salariat, invention radicale du Moyen-Âge occidental,
Qui découle de la « déparentalisation » de l’Occident chrétien,
Qui fait la différence.

Or le salariat ne relève pas du système économique, mais du système social.
Le salariat est une structuration de la société, que le système capitaliste occidental peut exploiter, et qui lui donne sa supériorité sur tous les autres systèmes économiques.

 

2 – Il ne faut pas confondre le système économique et le système social.

Les systèmes économique et social s’articulent l’un à l’autre, mais il faut distinguer ce qui relève de l’un et de l’autre, pour pouvoir les analyser, pour pouvoir analyser leur articulation.
Il faut les distinguer pour savoir ce qu’il faut attribuer à l’un et à l’autre, pour pouvoir apporter les solutions dans le cadre adéquat…, sinon elles handicaperont le système concerné, tout en restant inefficaces :
– Si on demande aux entreprises (système économique) d’assurer des emplois et des salaires garantis (système social) en dehors de leurs possibilités économiques, elles ne pourront pas le faire, sauf en se mettant en péril… ce qui au final, est contraire à l’intérêt des salariés concernés (système social).
– Si on demande aux salariés de s’adapter à toutes les conditions des entreprises en concurrence, il arrive un moment où ils ne peuvent plus vivre… À terme, la dégradation sociale, la précarisation, l’exclusion, produiront une baisse de « l’employabilité », une baisse du niveau social, qui réduiront la compétitivité économique des entreprises.

– La production, les entreprises, la compétitivité, les systèmes financiers, leur fonctionnement et leur régulation… relèvent du système économique.
– L’emploi, la sécurité de l’emploi, la retraite, la formation… relèvent du système social.

Pour obtenir une bonne réforme, il faudrait confier la gestion de chacun de ces problèmes à ceux qu’ils concernent, et non à ceux d’en face, comme on a tendance à le faire dans la confusion actuelle.

 

3 – La liberté et l’économie de marché.

Le marché, l’économie de marché mettent les entreprises en concurrence entre-elles face aux consommateurs.
L’économie de marché garantit la liberté de choix du consommateur, face aux entreprises qui sans elle, pourraient lui imposer la puissance de leur arbitraire.
L’économie de marché est donc la protection des consommateurs, individuels.
Si on supprimait la concurrence comme certains le demandent, les entreprises pourraient s’entendre et imposer leur bon-vouloir aux consommateurs-individus, avec la complicité des organes du pouvoir politique (intéressés, rémunérés?)…
La concurrence obligatoire est le principe de base contre la corruption.
Aussi l’UE a-t-elle mis le principe de concurrence au cœur de sa construction : elle est avant tout une protection des individus-consommateurs.
Cette concurrence oblige les entreprises à une adaptation et un ajustement permanents,
– qui se répercutent sur les salariés, qui en souffrent, plus ou moins.
Et c’est là que les salariés demandent, qu’au nom de la défense de l’emploi, on mette un bémol à cette sacro-sainte loi de la concurrence…
On ne voit pas, on ne veut pas voir que ce faisant, on favoriserait certaines entreprises aux dépens des autres, et sur des critères qui ne seraient plus économiques, qui ne seraient plus de productivité, de compétitivité…
Ce qui aurait pour effet de favoriser des entreprises et productions moins rentables, aux dépens de celles qui le sont davantage.
Comme si l’intérêt général, celui des salariés en particulier, pouvait être mieux servi par des entreprises moins productives !

On est même tenté dans certains milieux de résoudre la question du chômage et de la sécurité de l’emploi, par l’interdiction du licenciement.
Examinons cette proposition :
– Si l’on empêche les entreprises de licencier, elles ne pourront plus ajuster les dépenses aux recettes. Il faut donc leur garantir la vente de leurs produits pour leur garantir leurs recettes.
– Comment ?  En organisant la pénurie.
– Pour organiser la pénurie, il faut limiter l’offre, il faut empêcher toute offre sauvage, informelle, hors de l’organisation établie.
Pour ce faire, il faut fermer les frontières, empêcher la contrebande et le marché noir.
Pour obtenir ce résultat, il faut une organisation policière très stricte.
Pour pouvoir interdire les licenciements, il faut instaurer un État policier,
une dictature forcément de gauche, parce qu’une dictature de droite ne se souciera pas de garantir l’emploi des salariés.
C’est un système qui a déjà existé.
Cette absence de choix et de concurrence a pour conséquence de ne plus nécessiter la performance.
Si les entreprises ne peuvent plus soumettre leur production au libre choix des consommateurs, le prix des produits est fixé arbitrairement, fictivement.
Le prix réel ne peut donc être fixé.
Sans prix réel, les échanges ne peuvent se développer.
Sans échanges, la production ne peut se développer.
Sans échanges et sans production, la consommation stagne et régresse.
La dynamique productive détruite conduit à l’effondrement économique et à la régression sociale.
Pour maintenir un tel système, la répression devient de plus en plus nécessaire.
L’idéologie n’intervient que pour justifier cette répression.

Les populations soumises à ce régime n’ont qu’un désir : le quitter !

Il apparaît donc que la liberté de nos sociétés repose sur la possibilité du licenciement des salariés.

 

4 – Les entreprises sont des « entités individuelles ».

Le principe d’efficacité des entreprises repose sur le fait que leurs décisions ne prennent en compte que leur intérêt propre.
C’est la condition de leur performance, de leur succès et de leur survie.
Elles sont des entités individuelles parce que leurs performance, succès et survie dépendent de leur capacité à mettre en œuvre, en production les éléments judicieusement choisis dans leur environnement.
Elles prennent ceux qui les intéressent, qui leur sont utiles, et laissent les autres en dehors d’elles, ne s’en occupent pas, ne s’en chargent pas.
Toute charge inutile grève leur performance.
La performance des entreprises tient à la bonne sélection des éléments qui leur sont utiles et qui sont: l’objet de leur production, le capital, le marché, les effectifs…
Cette performance tient donc à la non-prise en charge des éléments qui ne leur sont pas utiles.
Cette sélection individuelle des éléments de production et leur mise en oeuvre particulière est une source infinie d’innovation dont les autres entreprises peuvent s’inspirer:
Elle est à la base du dynamisme économique.
La prise en charge de l’intérêt collectif est contraire à leur identité individuelle performative.

Peut-on gérer l’État comme une entreprise ?

Alors que les entreprises, concurrentes entre-elles, ne peuvent prendre en compte que leur propre intérêt.
Alors que les entreprises sélectionnent les éléments qui leur sont utiles, exclusivement…
L’État, lui, doit assumer le « TOUT ».

Si l’État sélectionnait certains éléments, il serait ensuite obligé de prendre en charge les éléments qu’il aurait éliminés, à la différence des entreprises.

Alors que l’efficacité des entreprises tient à la bonne sélection des éléments de production,
L’efficacité de l’État tient à sa capacité à assumer l’ensemble de la nation, population… utile ou à charge, actifs ou inactifs, productifs ou improductifs.

Si on demande aux entreprises d’assumer le tout, elles y perdent leur efficacité.
Si l’État n’assume pas le tout, il ne remplit pas sa fonction d’État.

Aussi importantes soient-elles, les entreprises restent des entités individuelles : elles n’assument pas le tout.
Aussi petits soient-ils, les États demeurent des entités collectives : ils assument le tout.

C’est là, la différence fondamentale entre l’État et l’entreprise.

Gérer l’État comme une entreprise est donc une aberration, et ne peut être accompli qu’en trompe l’œil, sauf à l’asservir à une catégorie particulière, oligarchie ou autre…

 

5 – Le capitalisme.

Aujourd’hui nous avons admis que chacun consomme ce qu’il veut… et ce qu’il peut.
La production est branchée sur cette demande, c’est à dire sur ce désir, libre.
Certes ce désir de consommer ne constitue en soi, en aucune manière, la résolution de notre question existentielle, mais les choix libres que nous faisons établissent notre cadre de vie, et notre façon d’y vivre.
Ces choix sont sollicités, orientés par la publicité que les producteurs nous imposent pour susciter notre désir…
Quoique je sois rétif à la publicité, il faut bien admettre qu’elle nous permet de faire notre choix parmi tant et tant de propositions.
Au fond, la publicité est au commerce moderne ce que l’étalage est au marché ou au magasin.
L’étalage, la publicité suscitent notre désir, qu’il appartient à chacun de maîtriser, pour maîtriser sa vie.
Chacun construit sa vie en vivant et maîtrisant son désir, au milieu de toutes les sollicitations, tous les droits, toutes les contraintes…
C’est la liberté, qui nous permet de maîtriser notre désir, d’en prendre la responsabilité… qui nous permet de construire l’équilibre de notre personnalité.

Notre désir, humain, est mimétique.
Mimétique, il est infini.
Alors que les animaux sont finis, déterminés; enfermés dans cette détermination.
Le génie humain est dans ce mimétisme, sa puissance est infinie…

Le capitalisme est calqué sur notre désir mimétique…
Il en épouse tous les contours, il en exploite tous les ressorts, il en a toutes les ressources, toute la fluidité…
Je n’arrive pas à imaginer comment un système économique pourrait être plus proche de notre désir mimétique que le système capitaliste.
Je n’arrive donc pas à imaginer qu’un autre système économique puisse mieux répondre à notre désir, mieux porter notre désir, que le capitalisme.
Tout autre système le restreindra, l’empêchera, le gênera, le contraindra…
Nous ne l’admettrons pas.
Tous, vous et moi, nous défendrons le capitalisme,
pour défendre la liberté de notre désir.
Si nous en avons toujours le choix… démocratique.

Les autres systèmes n’ont donc aucune chance tant que nous serons libres d’en décider… à moins qu’on en invente un, où notre désir sera encore plus libre !?

Mais tous les systèmes que l’on nous propose, limitent notre liberté.

Il est une tendance, pas seulement dans ce domaine, qui cherche un système parfait, idéal. Parfait, parce qu’il échapperait aux imperfections de notre condition humaine.
Sans forcément qu’il soit question de Dieu, il s’agirait d’un système au delà de l’humain :
– Puisque nous, humains, sommes imparfaits, un système parfait devrait échapper à notre imperfection…
– Pour ces gens-là, un système au dessus de nous, qui échapperait à notre contrôle humain serait « bien », idéal.
Ce qui revient à dire :
Que le monde serait plus beau, serait idéal, si nous n’étions pas responsables… de nous !
Se rend-on compte du danger que cela représenterait ? D’être irresponsables ?
Que notre  monde nous échappe… Ce serait bien ? Vraiment ???
Cette conception de la vie et du monde exprime une méconnaissance profonde du processus de l’évolution des sociétés humaines qui, tout au long de leur histoire, s’appuient sur la réalité de leur présent et de leur passé, pour construire leur avenir…

Quand on parle de désir, on pense bien sûr au désir sexuel.
Il est à la base du désir humain.
Il aspire à être assouvi, non seulement immédiatement, mais aussi durablement.
Non seulement physique, mais aussi dans la plénitude d’une vie dans toutes ses dimensions, sentimentale, conjugale, familiale…
Si le désir sexuel ne s’aboutit pas, il risque de n’être que souffrance.
On peut dire que l’amour est cet aboutissement, cette résolution.
Bien sûr il ne faut pas confondre le désir sexuel et l’amour.
Mais sans désir, il n’y a pas d’amour.

De même le capitalisme, s’il n’adhère pas au réel, au réel social donc, il tourne à vide, s’emballe, effréné comme un priapisme.
Il s’agit de le contraindre à travailler le réel, pour le réel.
Dans le capitalisme chacun des acteurs économiques a son intérêt, son désir propres… qu’il peut développer à son goût et à son gré, sans tenir compte de l’ensemble : c’est là que réside la puissance de son génie.
Il faut canaliser cette énergie, pour qu’elle produise ce que la société demande, mais il ne faut en aucun cas éviter de l’assumer, éviter d’en être responsables, aussi bien socialement que collectivement.

 

 6 – L’État.

L’État reflète les différentes composantes de la société.
Il reflète donc les forces et les faiblesses de ces différentes composantes.
Mais sa force à lui, repose sur celles de la société.
Il est logique qu’il privilégie l’économie, et d’abord les entreprises sur lesquelles reposent ses ressources, et donc sa puissance.
Pour développer sa puissance, l’État doit accroître ses ressources, et pour cela développer son économie. Il s’appuie sur les entreprises, mais des entreprises il considère la capacité productive, tandis que l’organisation de la production, du travail, restent une prérogative de l’entrepreneur : à bon droit, puisque de cette organisation dépend sa productivité… sa compétitivité.
L’évolution des conditions et du droit du travail, de sa rémunération, et de la prise en compte des intérêts des salariés n’est que secondaire, postérieure.

Cette prise en compte par l’État de l’intérêt des salariés, ne ressort pas à l’organisation du travail et de la production, mais à l’évolution de la société.
L’augmentation de la production permettant l’élévation du niveau de vie, cette élévation fait pression sur les conditions de travail et de rémunération des salariés ; d’autant plus que de leur rémunération dépend la consommation qui détermine pour une part la demande, qui permet la production, etc…
Tel qu’il est pris en compte par l’État, l’intérêt des salariés ne ressort pas au processus productif, mais à l’évolution sociale.

Cela tient au comportement du salariat (ensemble des salariés), qui n’assume aucune responsabilité économique : il se contente de recevoir… ce qu’il peut, en échange de son travail.

C’est cette position de dépendance, qui est une position de faiblesse… que l’État reflète.
Le salariat attend une protection de l’État, et pour cela, lui apporte le soutien… de sa faiblesse.
L’État social est faible, de la faiblesse du salariat.

À force d’être absents de la responsabilité du processus productif, les salariés se voient déterminée leur identité sociale par les entreprises, sans aucune intention ni possibilité de responsabilité de leur part.

Charles Péguy distinguait l’identité des enfants de celle des parents :

– Les enfants en position d’héritiers revendiquent des droits : ils sont mineurs.
– Les parents en position de responsables assurent les droits qu’ils accordent : ils sont majeurs.

Le salariat est en position de mineur. Il revendique des droits, des avantages, auprès de ses tuteurs : le patronat, l’État.

Il n’est pas maître de son destin ; cela, il ne le revendique pas.
En position de mineur, il demande qu’on décide pour lui à sa place, quitte à contester les décisions prises, car il a sa dignité !
Mais lorsque ses tuteurs décident à sa place, ils choisissent entre les salariés ; ils choisissent d’accorder à certains, et pas à d’autres.
Ceux qui ont obtenu un emploi, un avantage, exigent de les garder.
Ceux qui ont obtenu la protection de l’État exigent de la conserver, les autres la réclament…
Mais cette protection ne peut être accordée qu’à certains -AUX DÉPENS- des autres :
Sinon, c’est tout le système qui se bloque.
– Plus la sécurité de l’État est accordée à certains, plus les autres sont précarisés.

Pour sortir de cette impasse, il faut que le salariat devienne majeur, maître de lui-même, maître de son destin, en devenant responsable de sa solidarité collective, responsable de son insertion économique.

Alors il sera fort, majeur, et il apportera sa force à l’État.

 

7 – Le salariat.

La force de notre capitalisme occidental, c’est le salariat.
D’autres capitalismes ont existé avant le nôtre, mais s’appuyant sur des systèmes sociaux serviles ou des systèmes de parenté, ils n’ont pas survécu après l’avènement du capitalisme occidental qui, lui, s’appuyait sur le salariat.
Le salariat n’a pas été inventé par le capitalisme, qui se charge seulement de l’exploiter.

Le salariat a été inventé par le Moyen-Âge de l’Occident chrétien dans un très long processus d’évolution :

Il est le résultat de la « déparentalisation« , imposée par l’Église de Rome pour assurer sa domination.
Cette déparentalisation a consisté à disqualifier la filiation charnelle, au profit de la filiation spirituelle.
Cette disqualification a relativisé les rapports de parenté, a cassé la chaîne de la dépendance familiale.
Progressivement, la société s’est organisée sur la base de l’espace,
en lieu et place de la famille.
Lorsque en quittant la parenté, le social s’est enraciné, les impératifs de
préservation et de transmission du patrimoine se sont imposés aux personnes.
Les conséquences en ont été :
Le célibat, l’âge du mariage tardif, l’émigration des cadets.
Ce système se généralisant, le « jeune » a disposé de façon autonome de sa force de travail, chacun des membres du foyer pouvant avoir un patron particulier.
Dominant à partir du 18e siècle, le salariat présuppose la « propriété de soi », à savoir la liberté de sa force de travail, et de ses mouvements.
Le salariat ne peut se développer que dans une population dont les membres sont libres de disposer de leur force de travail : ce qui exclut les systèmes serviles, et aussi les systèmes de parenté.

C’est par l’adoption de ce système social occidental dont le salariat est la base que se développent les pays pauvres.

Les Révolutionnaires ont voulu démanteler les institutions de l’Ancien Régime :
Après les décrets d’Allarde de mars 1971, la Loi Le Chapelier du 14 juin 1791 proscrit les organisations ouvrières, les corporations des métiers, ainsi que les rassemblements paysans et ouvriers, et le compagnonnage.
Elle interdit de fait les grèves, les syndicats, les mutuelles…
L’idée était que ces associations attentaient à l’unité unanimiste de la Nation, et à la liberté individuelle : la « Nation » étant constituée d’individus-citoyens, elles introduisaient la division.
La loi contribue à la dissolution de l’Université et des facultés de médecine, au nom du libre exercice de la médecine… jusqu’à la création des écoles de santé.

Conçue sur les principes de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, comme le moyen d’assurer l’enrichissement de la nation et le progrès social, elle vise à garantir la liberté d’entreprise ; elle a eu pour effet de supprimer les guildes, corporations et groupements d’intérêts particuliers, détruisant les usages et coutumes de ces corps…
Elle provoque (dès 1800 chez les ouvriers charpentiers), la formation de ligues privées de défense, appelées syndicats, et des grèves, qu’elle permet de réprimer pendant presque tout le 19ème siècle.
Une nouvelle loi est votée en 1849 contre les coalitions ouvrières et patronales.

La Loi Le Chapelier a été abolie en 2 temps, en 1864 par la loi Ollivier qui abolit le délit de coalition, et le 21 mars 1884 par la loi Waldeck-Rousseau qui légalise les syndicats.

On le voit, il a fallu un siècle pour que les principes républicains prennent en compte l’intérêt collectif des salariés.

Les syndicats se sont ensuite développés, d’abord dans les grandes entreprises concentrant un grand nombre de salariés.
Puis les luttes des salariés tout au long du 20e siècle ont fait progresser leurs droits.
1936 est un moment important de ces luttes, mais plus symbolique que concret.
C’est après la libération que de grands progrès sociaux sont accomplis avec la construction de l’État-Providence.
Ce progrès a été possible par l’affaiblissement du patronat, qui s’était compromis avec le régime de Vichy et la collaboration.
La période de reconstruction, qu’on a pu appeler « les 30 Glorieuses », a été une période faste : non sans doute en termes absolus, mais parce que le progrès des avantages étaient continus.
Au sortir d’une guerre et d’une avant-guerre très éprouvantes, après la disqualification de ceux qui avaient mené à cette catastrophe et celle de leurs idées, les besoins immenses de la reconstruction, la mutation de l’économie et celle des mœurs, en même temps que le Tiers-Monde restait sous-développé… les conditions étaient réunies pour un progrès rapide, et pour croire à l’illusion de sa pérennité…

Le choc pétrolier d’octobre 1973 a été le coup d’arrêt de ce progrès continu, que l’on voulait croire permanent. Mais cela n’a pas été perçu sur le moment.
L’État-Providence a continué à distribuer ses prébendes alors qu’il commençait à ne plus en avoir les moyens, en ponctionnant les entreprises à la place des ménages, ce qui a stoppé l’investissement : ce qui représentait une impasse pour l’avenir.
Il faut rendre justice à la gauche socialiste d’avoir rétabli la logique économique au tournant de la rigueur de 1982/1983 en cassant l’indexation des salaires sur les prix, après les errements (sur le plan économique) de la première période.
Sur le plan social la dégradation a continué, mais de manière différenciée :
– Alors que certaines catégories sociales voyaient leur situation s’améliorer,
– D’autres plus fragiles ou fragilisées décrochaient, perdaient pied, étaient marginalisées, exclues.
Dans les années 80, phénomène aggravé ou accéléré par la mondialisation et la concurrence qu’elle implique, on a vu arriver les nouveaux pauvres, et puis les SDF…

Les 30 Glorieuses auront finalement été une période exceptionnelle, particulière, qu’il est illusoire de vouloir généraliser.

La base de croissance économique et de création d’emploi n’ayant été que conjoncturelles, cette conjoncture disparue, le progrès social et la sécurité de l’emploi qu’elle apportait disparaissent aussi.

Pourtant la richesse du pays continue de s’accroître, il n’y a donc pas de raison économique pour que la situation sociale se dégrade.
Non, c’est le système social qui n’a pas un fonctionnement adéquat.
L’erreur constante est de vouloir apporter une réponse économique à un problème social.

Donner une réponse économique à un problème social, est une façon d’éluder la question sociale.

 

8 – Pourquoi les syndicats ne défendent-ils pas les salariés précaires ?

Les syndicats se sont constitués à partir de la production industrielle capitaliste.
C’est la concentration des travailleurs sur un même lieu, dans les mêmes conditions de travail, soumis à un même patron qui a suscité leur émergence.
Ils se sont constitués pour obtenir des améliorations de rémunération, de conditions de travail… de la part de celui qui pouvait les leur accorder : leur employeur.
Puis les syndicats se sont généralisés, avec les luttes que l’on connaît.
En se généralisant, ils sont devenus une institution collective… mais en gardant la base de l’entreprise dans laquelle ils étaient employés.
Les syndicats ont bien-sûr des revendications collectives, mais elles ne peuvent être mises en œuvre que dans les entreprises : et pour pouvoir en bénéficier, il faut d’abord être embauché.
Dans les entreprises les syndicats ne peuvent défendre que les salariés embauchés, les autres restant en dehors.
Et dans l’entreprise, les différents types de contrat de travail, les différents types d’entreprise, dominantes ou sous-traitantes… créent des disparités entre les salariés :
Dans ce cadre, les salariés les mieux nantis sont les mieux défendus.

En prenant l’entreprise comme base de leur intervention, les syndicats entérinent et renforcent l’inégalité entre les entreprises, la répercutent sur les salariés,
Et exercent ainsi le verrouillage le plus efficace de l’inégalité salariale et sociale.

Pour échapper à cette logique, il faut que les syndicats quittent l’entreprise comme base de leur action.
Pour cela, il faut :
– Créer une organisation solidaire collective de tous les salariés, sans exception.
– Redéfinir le rôle des partenaires, ainsi que leur rapport entre-eux.
– Créer le cadre institutionnel dans lequel cette nouvelle action syndicale, la légalité, et les ressources financières  pourront être mises en œuvre.
La solidarité collective des salariés permettrait un accompagnement dynamique individuel, de tous les salariés, dans tous les moments et tous les stades de leur vie professionnelle… et dès avant le début de leur formation professionnelle.
Cela implique d’abandonner le CDI et le statut de fonctionnaire, parce que la sécurité de l’emploi ne serait plus assurée par l’employeur, mais par cette solidarité collective salariale.

Depuis l’origine, on progressait par l’ajout de droits nouveaux, toujours basés sur l’entreprise.
C’est une rupture conceptuelle radicale.

 

9 – L’exclusion sociale et professionnelle est l’œuvre des salariés.

Bien entendu il n’est pas question de les stigmatiser, ils le font sans aucune intention.

Le salariat représente 90% environ de la population active, et dans toutes les catégories professionnelles.
Il représente donc la masse centrale des actifs, les autres sont marginaux.
Les entreprises, le patronat, ou l’État restent extérieurs à cette masse.

C’est le mouvement général des salariés recherchant un emploi sécurisé, et particulièrement un emploi public,
– qui produit  une force centrifuge qui peu à peu, et de plus en plus, exclut les plus fragiles, ou qui à force d’exclusion le deviennent,
– jusqu’à une désocialisation croissante par leur « non-employabilité » que leur exclusion a produit.

Cette sélection spontanée, naturelle pourrait-on dire, est à la base du système actuel, qui donne à chacun le sentiment, de plus en plus, qu’il est seul, sans défense.
En réaction, chacun recherche une garantie qui, dans ce système grégaire, le renforce encore, l’aggrave.

C’est l’assurance d’être secouru individuellement qui crée le sentiment de sécurité collective.

Elle existe dans de nombreux domaines : santé, accidents, naufrages… mais pas dans celui de l’emploi.
On s’épuise à essayer de réparer ou d’atténuer les effets du système (RMI, RSA)… tout en le conservant.

Il faut sortir de ce système grégaire-centrifuge qui assure la sécurité à certains aux dépens des autres,
Et le remplacer par un système collectif solidaire, centripète.

 

10 – L’individualisme nécessite la solidarité collective, contre la solidarité grégaire.

J’ai longtemps confondu le grégaire et le collectif. La différence est pourtant essentielle.
Dès l’origine, c’est le groupe qui est premier : l’individu ne peut exister, vivre, survivre qu’au sein du groupe… qui le sacrifie si nécessaire pour assurer son propre intérêt, sa propre survie.

L’individualisme s’établit par l’émancipation de l’individu à l’égard du groupe.
Mais si l’individu reste seul : il est isolé, faible, sans défense.
Pour continuer à échapper à la tutelle du ou des groupes, il a besoin de trouver une sécurité, une défense en s’alliant avec tous les autres individus émancipés… sinon il retombera sous la coupe de ces groupes, soumis à leur volonté.
Le groupe apporte une protection à ceux qui en font partie, à l’exclusion des autres.
Ceux qui n’en font pas partie ne sont pas protégés, par définition.
Par le seul fait d’exister, le groupe sélectionne ceux qu’il protège : et donc exclut les autres.

Le collectif est cette instance où les individus émancipés, autonomes, libres, se rejoignent.

C’est la solidarité des individus émancipés des groupes, qui produit cette instance collective.

Le collectif est donc une création de l’individualisme.

Actuellement le salariat fonctionne sur la logique grégaire :

L’accession à l’emploi, la sécurité de cet emploi est accordé par l’inclusion dans un groupe: entreprise, entreprise publique, administration, statut… :
– Ceux qui sont embauchés obtiennent ces avantages, à l’exclusion des autres, aux dépens des autres.
– Ces entreprises… ne peuvent embaucher que ceux dont elles ont besoin : elles choisissent donc, elles sélectionnent, elles éliminent.
– Les salariés se plient à cet ordre des choses, ils acceptent de laisser aux employeurs le plein pouvoir de choisir entre-eux, ceux qu’ils sélectionnent, ceux qu’ils éliminent.
Les entreprises n’ont pas le choix : si elles ne le font pas, elles disparaissent.

C’est là que le salariat est hypocrite : lorsqu’il manifeste pour conserver l’emploi, public en particulier, il demande :

– que l’emploi de ceux qui le possèdent soit préservé,
– contre ceux qui ont été exclus.
Lorsque des salariés demandent que le statut de leur emploi reste public, ils demandent de ne pas devenir précaires, ils demandent donc que d’autres salariés soient précaires à leur place.
Dans ce système grégaire, on choisit ceux que l’on sacrifie au profit des autres.

La précarité des uns est la garantie de l’emploi des autres.

Dans ce système la précarité est obligatoire, elle permet l’ajustement permanent.
Sans elle, le système se bloque.

 

11 – L’illusion socialiste : charger l’État de la solidarité collective.

C’est une erreur de conceptualisation qui vient du processus de l’avènement de l’idée de socialisme.
Le socialisme est né de la critique du capitalisme, pour prendre en compte les intérêts du salariat.
Le capitalisme se caractérisait par la propriété privée des moyens de production, donc par des patrons privés.
Pour contrecarrer cette propriété privée, et prendre en compte l’intérêt collectif du salariat, il fallait trouver une autre instance, collective.
L’État s’est imposé en l’absence de toute autre possibilité.
La confusion s’est établie entre les caractères : public et collectif.
Ce qui est public, n’est effectivement pas privé… mais n’est pas pour autant collectif.

Il y a ici plusieurs séries de concepts qui s’entrecroisent, se mélangent dans un amalgame erroné :
1 – groupe, individu, collectif.
2 – privé, public.
3 – État, société civile.

– 1 : Le collectif est l’instance des individus solidaires, émancipés du groupe.
– 2 : Le privé s’oppose à l’État, mais aussi au social. Le public représente donc aussi bien l’État, que la société civile, de manière différente.
– 3 : L’État reflète les différentes composantes de la société civile.

L’invention du salariat est l’invention de l’émancipation sociale des individus à l’égard du groupe.
Le salariat aurait dû ensuite continuer à se développer par la solidarité collective… mais cela demandait une capacité d’organisation, de conceptualisation, un pouvoir économique et social, hors de leur imagination.
Il s’est rabattu sur la protection, publique, de l’État, mais cette protection est grégaire : puisqu’elle protège certains salariés, et pas d’autres.
Elle est donc une régression par rapport à l’émancipation individuelle de l’invention du salariat.

L’erreur a consisté à confondre l’instance étatique, avec les composantes sociales :
– Le patronat, le salariat, sont des composantes sociales.
– L’État reflète ces composantes sans en être une lui-même.
– Or, en lui demandant de jouer un rôle économique, en tant qu’instance collective, on l’a assimilé à ces composantes sociales, alors qu’il reflète en même temps toutes les autres. Cette confusion des rôles le conduit à ne plus être impartial : puisqu’en matière sociale il est devenu juge et partie.
– Mais le plus grave, c’est qu’il a ainsi dispensé le salariat de solidarité interne.
On a donc un système où la solidarité collective étatique – compense – l’inégalité grégaire interne du salariat.

Dès le Moyen-Âge, le salariat a été l’invention qui a permis à l’individu de s’émanciper du groupe… mais en interne, il est demeuré dans une logique grégaire. Sans solidarité collective.

Alors que l’invention du salariat a représenté l’émancipation de l’individu au Moyen-Âge,
qui préfigure l’avènement de l’égalité démocratique…
il demeure structuré, encore aujourd’hui, sur le principe des avantages particuliers…
de l’Ancien Régime !!!

Le recours à la protection de l’État exprime cette absence de solidarité collective, parce que la protection de l’État est une protection particulière, pour certains, aux dépens des autres:
– L’État se contente de choisir et de distinguer, ceux qu’il protège, de ceux qu’il ne protège pas.
Et le salariat, hypocrite, se complaît dans cette inégalité, tout en faisant semblant d’être solidaire.
La confusion des instances étatique et sociale, permet de fausser le regard sur les responsabilités réelles, et empêche de trouver les solutions efficientes.

L’illusion du socialisme réside dans ces confusions et contradictions ; illusion qui a pu sembler efficace tant que la conjoncture était favorable, mais qui s’effondre quand elle ne l’est plus.
Mais la protection de l’État est grégaire : grégaire, elle donne une protection à certains et pas à d’autres :
– Ceux qui bénéficient de cette protection ne veulent pas la perdre…
– Alors que les autres en souffrent !

Voilà l’impasse actuelle :
Nous avons un salariat : mineur, irresponsable, non-solidaire, inégalitaire… collectivement.

Voilà le chantier de la réforme…

 

12 – L’illusion libérale.

Si l’illusion socialiste a confondu l’instance publique de l’État, avec la solidarité collective, avec une composante sociale, a attendu que l’État remplisse ces fonctions à la place des citoyens eux-mêmes, et des salariés en particulier…, l’illusion libérale, elle, a oublié que la base de la richesse était la production, donc le travail.
Tout ce qui n’est pas produit, n’existe pas.
J’émets là un truisme qui, pourtant, ne va pas de soi dans la mentalité libérale.

Tout enrichissement hors de cette production ne peut être obtenu que par la dépossession d’autres acteurs économiques ou sociaux : c’est à dire par leur appauvrissement.
L’enrichissement n’est donc pas réel, il s’agit seulement d’un transfert de richesse.
Peut-être d’une spoliation.

L’illusion libérale oublie que l’activité économique consiste à produire ce que les sociétés ont besoin pour vivre.
Elle oublie que le « gain » de base, est la rémunération du travail, pour celui qui l’a produit… qui lui permet de vivre… de consommer… donc d’acheter… donc de faire produire, d’autres qui seront rémunérés, consommeront, achèteront…

Au lieu de cela, elle fonde son gain sur la « rentabilité » d’un capital.
Ce capital est investi dans des entreprises, qui le rémunèrent par leur production.
Production qui nécessite le travail des producteurs.
Par l’intermédiaire du système financier, les investisseurs, tous, vous et moi, tous ceux qui ont de l’argent devant eux, ou ceux qui ont des retraites par capitalisation… les investisseurs donc, essaient d’obtenir la meilleure rentabilité de leur capital.
Cette rentabilité repose sur la productivité des entreprises… au delà de cette productivité, la rémunération ampute les autres partenaires de leur part.
Mais à leur place d’actionnaires, ils ne soucient pas de cette productivité.

Je me souviens il y a quelques années, je voyais les salariés américains jouer à la bourse, avec y compris des actions de leurs propres entreprises, et compter davantage sur leurs gains boursiers, que sur leurs salaires.
J’étais effaré, parce qu’ils n’avaient pas conscience que ces gains étaient obtenus grâce à leur productivité de salarié.
Dans le conflit d’intérêt intérieur entre leurs 2 statuts, de salarié et de capitaliste, ils arbitraient en faveur du capitaliste, aux dépens du salarié… par le désir de faire fortune… goût du jeu… sans se rendre compte qu’ils en feraient les frais en tant que salariés !
Ils préféraient l’illusion du gain du jeu, à la plate réalité du salaire.

En généralisant cette notion de gain boursier, avec les fonds de pension par exemple, la notion de richesse se déconnecte de celle de la production.
La mondialisation séparant et éloignant les producteurs – avec des salaires très variables – des consommateurs, a facilité cette déconnection.
Dans ce contexte, le rapport entre le coût de production et le revenu n’a plus été évident.
La voie était ainsi ouverte à la dérive.
Finalement, que la dérive de ce délire ait mené à la chute est rassurant !

L’illusion libérale et l’illusion socialiste se reflètent en s’opposant :
– L’illusion socialiste fuit la contrainte de l’adaptation à la production par le recours à l’État, et le refus de la solidarité collective salariale.
– L’illusion libérale accepte cette contrainte, mais en s’évadant dans un délire de richesse individuelle par la spéculation… et là-encore en refusant toute solidarité collective salariale.

Les illusions socialiste et libérale se rejoignent dans le refus de la solidarité collective :
– socialiste, par la solidarité grégaire,
– libérale, par l’intérêt individuel.

Les deux peuvent aussi s’associer : l’égoïsme individuel se coulant dans l’égoïsme grégaire, pour une efficacité maximale.

 

Récapitulation :

1 C’est le salariat qui constitue le cœur, la base, de notre société démocratique, libre, individualiste et développée…, le capitalisme se contente de l’exploiter.

2 Il ne faut pas confondre le système économique et le système social :
– Le salariat relève du système social.
– Le capitalisme relève du système économique.

3 La liberté de notre société repose sur l’économie de marché :
– qui est régie par la concurrence,
– qui nécessite des entreprises une adaptation permanente,
– qui doivent donc avoir la possibilité de licencier leurs salariés, pour s’adapter…
Notre liberté repose donc sur la possibilité du licenciement des salariés.

4 Les entreprises sont des entités individuelles :
– leur efficacité, leur performance tient à l’individualité de leurs décisions,
– les soumettre à des décisions collectives la leur ferait perdre,
– elles ne peuvent donc pas assumer de responsabilités collectives, en concurrence entre-elles, soumises à la nécessité d’équilibrer leurs comptes à court terme, sans quoi elles n’ont plus d’avenir ;
Elles ne peuvent donc pas assumer la responsabilité de l’intérêt général, et particulièrement à long terme.

5 Le capitalisme est calqué sur notre désir mimétique, sur lequel est fondée notre humanité.
– Aucun autre système économique ne peut être plus proche de nous, que lui.
– mais il nous faut le maîtriser pour le faire travailler à notre profit,
– comme nous devons maîtriser notre désir mimétique, pour maîtriser notre humanité.

6 L’État reflète les différentes composantes de la société :
– il n’est pas lui-même une de ces composantes,
– il ne faut donc pas lui demander d’en remplir une des fonctions

7 La force du capitalisme, c’est le salariat :
d’autres capitalismes, sans salariat, ont disparu,
– le salariat n’a pas été inventé par le capitalisme (il se contente de l’exploiter),
– c’est l’Occident chrétien, au Moyen-Age, qui l’a inventé,
– les principes républicains n’ont pris en compte l’intérêt collectif salarial qu’à la fin du 19e siècle.

8 Les syndicats ne défendent pas les salariés précaires parce que leur action est basée sur l’entreprise,
– les entreprises devant s’adapter en permanence :
– les syndicats leur laissent la faculté de choisir entre-eux, à leur place, ceux qui leur conviennent et comme ils leur conviennent,
– ils se contentent ensuite de défendre les avantages de ceux qui ont été sélectionnés,
– ils ne peuvent défendre les salariés précaires, car c’est de leur précarité que dépendent les avantages des salariés sélectionnés.

9 L’exclusion sociale et professionnelle est l’œuvre des salariés,

– les salariés représentent 90% de la population active :

– C’est le mouvement général des salariés recherchant un emploi sécurisé, et particulièrement un emploi public,
– qui produit  une force centrifuge qui peu à peu, et de plus en plus, exclut les plus fragiles, ou qui à force d’exclusion le deviennent,
– jusqu’à une désocialisation croissante par leur « non-employabilité » que leur exclusion a produit.

Cette sélection spontanée, naturelle pourrait-on dire, est à la base du système actuel, qui donne à chacun le sentiment, de plus en plus, qu’il est seul, sans défense.
En réaction, chacun recherche une garantie qui, dans ce système grégaire… le renforce encore, l’aggrave.
– C’est l’assurance d’être secouru individuellement, qui crée le sentiment de sécurité collective.

10 L’individualisme, l’intérêt individuel, la sécurité individuelle, nécessitent la solidarité collective,

– contre la solidarité grégaire,
– c’est la solidarité des individus émancipés des groupes, qui produit l’instance collective,
– le collectif est donc une création de l’individualisme,
– qui s’oppose à l’intérêt de la solidarité grégaire.

Un « exclu » est un individu émancipé du groupe,
– qui a donc perdu la solidarité grégaire de ce groupe,
– mais qui n’a pas retrouvé de solidarité collective, pour la remplacer.

11 L’illusion socialiste : charger l’État de la solidarité collective :
– le socialisme, né de la critique du capitalisme, a voulu substituer l’instance publique de l’État, à celle privée, des capitalistes.
– alors que le salariat est né de l’émancipation de l’individu à l’égard du groupe,
– alors que le salariat aurait dû se développer par la solidarité collective,
– il a substitué le public au collectif,
– laissant ainsi le salariat dans sa logique grégaire, inégalitaire… incapable de concevoir sa solidarité collective interne.

12 L’illusion libérale déconnecte la notion de richesse de la production, donc du travail, pour arrimer cette richesse à la rentabilité du capital… et de la spéculation.
Le salariat en se « libéralisant », refuse la solidarité collective, pour un gain individuel, spéculatif…

 

Inventer le réel

Tout ce que j’écris sur ce site est cohérent.
Mon projet (et ma difficulté), est de vous rendre, à vous lecteurs, cette cohérence intelligible.
La cohérence est la condition de la viabilité des analyses et des propositions.

Pour trouver des solutions, il faut imaginer un autre réel que le nôtre… et qui soit viable : c’est à dire qu’il soit possible, qu’il fonctionne harmonieusement, que les dysfonctionnements actuels soient résolus…

Or, la pensée, le système de pensée, les habitudes de pensée avec lesquels nous allons penser ce réel, nouveau, nous viennent de la réalité présente.
Ces habitudes de pensée reproduisent cette réalité… alors que nous voulons la changer.
La difficulté, en quelque sorte, est d’arriver « à penser autre chose que ce l’on pense ».
En le formulant ainsi, on voit bien la difficulté.

Il ne suffit pas de trouver les solutions techniques adéquates, il faut arriver à penser le réel à venir, alors qu’il n’existe pas encore… et que nous avons pour le penser, les habitudes de pensée qui produisent et reproduisent la réalité présente, que précisément, nous voulons changer.

Il nous faut donc sortir de nos habitudes de pensée pour penser le réel futur : c’est la première difficulté, et la plus importante.
Cela s’appelle imaginer.
Quand il s’agit d’imaginer de la fiction, c’est facile : chacun se fait son film.
Mais lorsqu’on imagine le réel, il faut qu’il corresponde à un possible commun à tous.
La contrainte est redoutable.

Le réel est formulé par les relations sociales, ce qui n’entre pas dans l’expression de ces relations sociales, n’existe pas pour cette société-là.
Il ne peut pas exister parce qu’il n’est pas conçu.
Et il n’est pas conçu parce que les relations sociales ne l’ont pas produit, formulé, conceptualisé.
Le réel est interprété. Le réel est une interprétation.
Imaginer le réel futur, consiste à interpréter un nouveau réel, contre les habitudes de pensée qui produisent l’ancien.

Il faut donc imaginer contre ses propres habitudes de pensée.

Or les habitudes de pensée nous sécurisent parce qu’elles expriment une réalité connue.

Il nous faut donc quitter la sécurité du connu, et faire un saut dans l’inconnu.
Outre la capacité d’imagination que la démarche requiert, il faut aussi surmonter sa peur.
On comprend qu’on ne se décide à cette démarche que lorsque la situation est vraiment insupportable, qu’on a le sentiment de n’avoir plus rien à perdre.

Lorsque je fais des propositions, j’essaie donc d’imaginer un autre réel, viable, en dehors de nos habitudes de pensée…
Mais vous, lorsque vous me lisez :
Faites-vous l’effort de sortir de vos propres habitudes de pensée ?  Pas forcément.
Si vous n’en sortez pas, vous jugez mes propos sur des critères qui ne sont pas ceux qui les déterminent :
– Vous jugez un projet  d’invention avec des critères de  conservation.
Ce qui est un contresens.

Voilà ma difficulté de me faire entendre de vous :
Pour que vous entendiez ce que je dis, il faut que vous l’imaginiez… tel que je le dis.
Si vous ne l’imaginez pas, vous ne l’entendez pas.
Pour pouvoir critiquer utilement le projet, il faut d’abord l’avoir imaginé.

Le risque majeur de l’imagination d’un autre réel, c’est de s’abstraire… du réel !
Devant la difficulté à maîtriser tous les paramètres nécessaires à la conception de ce nouveau réel, la tentation est grande de décoller, de planer au dessus de ce réel im-maîtrisable…
Alors, libéré de la contrainte de ce réel récalcitrant, on peut se laisser aller à son imagination rêveuse, utopique, fictive… ou tout est possible puisque le réel ne la contraint plus !
Mais c’est un mensonge, car pour pouvoir continuer garder la légitimité de son jugement, on prétend être toujours dans le réel.
C’est une fuite du réel, un délire.

La forme la plus universelle de ce délire est le besoin que l’on a de s’en prendre à quelqu’un pour expliquer nos malheurs, nos difficultés :
– C’est la faute au capitalisme, à la droite, à la gauche, au néolibéralisme, aux syndicats, aux américains, aux enseignants, aux spéculateurs, aux socialistes, aux actionnaires, aux soixante-huitards, au patronat, à l’immigration, aux parents, à l’ultra-libéralisme, au péché originel, à l’Église catholique, à l’Islam, aux enfants, à la société de consommation, à l’Éducation Nationale, aux fonctionnaires, aux jeunes, aux vieux, aux agriculteurs, aux touristes… (pour dire : aux juifs, aux arabes, aux noirs : ça devient plus difficile…)
Ce délire paranoïaque de la persécution , universel, falsifie notre perception du réel.
Je signale qu’on persécute, en se croyant persécuté !

Inventer le réel est une démarche pleine d’écueils, qu’il faut accomplir avec une détermination féroce, pour ne pas sombrer dans l’illusion, tout en imaginant un réel, bien réel, nouveau, qui ne soit pas le simple prolongement de la réalité présente…

 

Philosophie et objectifs de la réforme.

Mes propositions se réaliseront dans le même cadre financier, sans dépense supplémentaire.
C’est la mise en œuvre de la réforme qui, à terme, modifiera les équilibres financiers entre les différentes catégories sociales.

Les 2 grands problèmes du monde actuel, après celui de la violence que je ne traite pas ici : – c’est l’inégalité sociale avec sa croissance exponentielle actuelle,
– et l’insécurité de l’emploi, et donc des revenus.
Alors que nous sommes de plus en plus riches, la croissance de cette inégalité réduit à la misère et à l’insécurité, chez nous, des catégories sociales qui auparavant, même pauvres, possédaient cette sécurité.
Dans les pays en développement, la croissance de l’inégalité n’a pas les mêmes effets dévastateurs parce que en même temps, la croissance économique réduit la pauvreté absolue… Mais très vite, l’inégalité entravera leur développement.

Les systèmes économiques ne sont pas moraux, le capitalisme ne l’est pas non-plus.
Ils ne sont ni moraux, ni immoraux : ils sont amoraux.
La morale se situe dans le système social.
L’inégalité, la sécurité, ne sont pas des questions économiques, mais sociales.
La morale, les valeurs qui permettent de vivre ensemble relèvent du système social.

Je considère que le système économique n’est pas en cause, parce que les systèmes sociaux font ce qu’ils veulent des systèmes économiques.

Je m’attache donc à la réforme du système social.

Les sociétés démocratiques, développées, ont une composante centrale majeure :
– le salariat : qui représente 90% de la population active, aussi bien en bas qu’en haut de l’échelle sociale.

Le salariat est mineur : il est dépendant, il ne s’assume pas lui-même, il n’est pas solidaire.
Son comportement interne, grégaire, soumis aux décisions et à la sélection de ses tuteurs, laisse ses membres individuels sans protection, et sans prise sur leur propre destin…

La réforme que je propose consiste à structurer le salariat dans une solidarité collective interne :
– qui donne à chacun la sécurité de l’emploi dans la mobilité; mobilité nécessaire non-seulement aux entreprises, mais aux individus eux-mêmes pour s’adapter au monde en mouvement,
– qui donne au salariat, par l’intermédiaire des syndicats, un pouvoir économique collectif,  qui ne se confond pas avec celui, individuel, des entreprises,
– qui lui donne la maîtrise de son destin, par celles des carrières, des formations et mutations professionnelles,
– et aussi une capacité d’investissement pour construire et développer une économie qui réponde au besoin d’emploi immédiat et à long terme, en articulation avec celles des entreprises et de l’État,
– capable d’accompagner, d’anticiper les mutations, éventuellement de les décider plutôt que de les subir,
– qui gère donc, de manière collective, des capitaux dont la propriété demeure privée, toujours dans le cadre concurrentiel, ce qui permettra de leur affecter expressément une destination à utilité sociale tout en leur gardant leur efficacité productive, et donc leur rentabilité.

Imaginez un salariat uni, fort de sa solidarité, comme un pack de rugby…
Mais libre.
Libre de sa solidarité collective qui permet à chacun, avec le soutien de tous les autres, d’appréhender le monde sans peur.
Il ne s’agit pas d’une solidarité de bons sentiments.
Il s’agit d’une solidarité structurelle dans laquelle l’expression de la liberté de chacun, soutient la liberté et la sécurité des autres.
À l’inverse d’aujourd’hui !

Imaginez un salariat fort qui serait capable d’imposer son point de vue, qui obligerait le patronat à en tenir compte… avec qui il pourrait s’allier pour défendre les entreprises contre les actionnaires, les spéculateurs et la finance.
Après tout, le patronat et le salariat ont le même centre d’intérêt : l’entreprise.
Au contraire de la finance avec son comportement prédateur.

Imaginez un salariat qui crée des entreprises qui soient conformes à ses attentes,
– qui invente des méthodes de management qui soient performantes en améliorant les conditions de travail, organise la sélection des entreprises en fonction de la qualité de leurs conditions de travail…
– qui forme des chefs d’entreprises,
– qui maîtrise la recherche dans la continuité que lui permet sa permanence collective, à la différence des entreprises soumises au diktat du résultat immédiat, et aux politiques soumis à celui des élections.
Je refuse aussi bien l’autogestion que la cogestion, parce que l’efficacité productive nécessite la décision individuelle, alors que les décisions du salariat ou des syndicats ne peuvent être que collectives pour obtenir leur efficacité propre.

Le salariat, solidairement uni, est la seule composante sociale qui puisse représenter l’intérêt général dans sa permanence.

Je me suis contenté d’analyser les points, les critères , les éléments, dont j’avais besoin pour présenter mes propositions.
Le choix de ces éléments fait donc partie de l’analyse.
Ce choix, ces analyses, ne peuvent être validés que par le résultat qu’ils obtiendront… à condition que ce résultat soit positif.



.                                                 La réforme du salariat

Des analyses que j’ai développées, il apparaît que pour obtenir que le système social soit en mesure d’exercer un contrôle sur le système économique, c’est du salariat que le système social peut tirer cette capacité.
C’est le salariat qui possède toutes les bases et les ressources pour ce faire.
C’est donc le salariat que je me propose de réformer.

Voici comment j’imagine les solutions à nos problèmes.

Il s’agit de réformer le système social pour qu’il soit en mesure,
– de prendre le contrôle du système économique,
– de maîtriser les inégalités,
– d’assurer la sécurité de l’emploi par la solidarité collective,
– d’assurer ainsi une sécurité sociale, civile, à chacun et à tous.

Au cœur de ce système social, c’est le salariat, massif, qui en est la composante majeure.
Pour l’instant, il a un fonctionnement grégaire, au détriment de ses membres individuels, qui en souffrent.
C’est donc ce salariat qu’il faut réformer.

Je conçois ma réforme en 3 points :

                      

                                 1° Point : D’abord la mobilité.

La mobilité doit être initiée par les salariés et à leur profit exclusif, donc gérée par les syndicats.
Les employeurs ne doivent pas s’en mêler, pour bien signifier qu’il s’agit de solidarité entre salariés.

La mobilité doit être instaurée d’abord pour créer un flux de mobilité que les syndicats pourront conduire : ainsi ils pourront agir.
C’est dans ce mouvement, que la capacité d’exercer un pouvoir de contrôle s’instaure.

Pour créer ce flux de mobilité, il y faut une incitation, je propose :
– La taxe d’ancienneté.
Il s’agit de transformer la prime d’ancienneté, en taxe.

Cette taxe payée par tous les salariés alimente une caisse qui servira à payer un « pécule » aux salariés qui quittent leur emploi.
Les sommes restent constantes, mais au lieu d’être affectées aux salariés qui s’incrustent dans leur emploi, elles sont affectées à ceux qui le quittent.

Plus le salarié s’éternise dans un emploi, plus sa contribution augmente, au delà bien-sûr de la période d’adaptation…
Plus sa contribution augmentera, plus il se demandera jusqu’à quand l’emploi qu’il occupe sera « intéressant », il se projettera vers l’avenir pour envisager la suite de sa carrière. Il arrivera un moment où il décidera de le quitter.
Plus la durée de l’emploi sera court, plus le pécule sera faible ; plus la durée sera longue, plus le pécule sera important.
Le réglage, le dosage devront être ajustés pour obtenir un bon niveau de mobilité, ni trop, ni trop peu.
Le salarié décidera en fonction de l’équilibre de son intérêt, et la façon dont il envisage son avenir.

Pour pouvoir quitter son emploi, il faut qu’il en envisage un autre :
Pour explorer toutes les possibilités, et toutes les perspectives, il s’adresse au/aux syndicats de son choix :
Les syndicats qui collectivement ont toutes les cartes en main,
– pour simplement trouver un nouvel emploi du même type,
– ou alors proposer une formation pour un autre,
– ou encore le créer.
Lorsqu’il quitte son emploi, le salarié sait où il va : il n’est donc pas précarisé.
Et sa mobilité est facilitée financièrement, par le pécule.
De cette manière, c’est l’ensemble des salariés ayant un emploi, qui finance la mobilité salariale.

Le salarié se trouve ainsi adossé à la puissance collective des syndicats pour exercer sa mobilité dans la sécurité : il n’est plus seul contre tous les autres.
Et l’exercice de la liberté de son intérêt, contribue à liberté et à la sécurité de celui des autres salariés.
On arrive ainsi à conjuguer l’intérêt individuel et la solidarité collective : l’un s’appuyant sur l’autre.

C’est le principe des nouveaux ronds-points sur la route :
– Dans les anciens ronds-points, la priorité était donnée à droite, c’est à dire à ceux qui y entraient.
Résultat : en empêchant les autres d’en sortir, ils ne pouvaient eux-mêmes y entrer. Dès que la circulation était un peu trop importante, elle était bloquée.
– Dans les nouveaux ronds-points, la priorité est donnée à celui qui le quitte :
De cette manière, il libère la place pour que d’autres puissent y entrer… et la circulation infiniment plus fluide et moins dangereuse.

Cette structuration du marché du travail, allie la mobilité à la liberté, tout en assurant la sécurité de l’emploi.
Pour prendre la mesure de l’ampleur de cette action syndicale, il faut imaginer que tous les moyens, institutionnels, structurels, financiers… pôle-emploi, assedic, mission locale, etc… et tous les organismes qui gravitent… et tous leurs financements, seraient à la disposition des syndicats.
La médecine du travail leur reviendrait aussi.

Priorité donc à celui qui quitte son emploi.

 

                                2° Point : La formation professionnelle.

Les syndicats prennent en charge la formation professionnelle et la formation continue, en totalité.

Dès le collège, où ils vont chercher les élèves en tant que futurs collègues, pour leur faire découvrir le monde du travail, et ainsi leur permettre de l’apprivoiser.
Je propose que les syndicats soient responsables de l’orientation scolaire,
– et soient les tuteurs/accompagnateurs des élèves vers l’insertion professionnelle.
Il est peu judicieux que les responsables de l’orientation au sein de l’Éducation Nationale, soient des membres de cette Éducation Nationale : ils ne peuvent pas être des passeurs, car le seul milieu professionnel qu’ils pratiquent est celui de l’Éducation Nationale, et les conseils qu’ils peuvent donner aux élèves, sauf pour les carrières au sein de l’EN, va les expulser de ce milieu professionnel dont ils sont… pour un autre dont ils ne sont pas.

Depuis l’avènement de la société industrielle, le lieu de travail se dissocie du lieu de vie, les enfants connaissent de moins en moins la vie professionnelle de leurs parents : les enfants n’apprennent plus la vie réelle, professionnelle, de leurs parents. Cette évolution s’est accélérée les dernières décennies : moi par exemple enfant, après l’école je rentrais à la maison dans la ferme de mes parents : j’ai vécu toute mon enfance dans le milieu professionnel de mes parents.
Aujourd’hui, c’est totalement terminé. Les enfants-élèves doivent se projeter dans un monde professionnel inconnu d’eux.
L’orientation scolaire qui dirige vers la profession future, doit être assurée par la représentation collective de ces professionnels.
De cette manière, les syndicats auront une vue prospective de l’avenir du salariat, et auront la faculté d’intervenir pour l’influer selon leurs besoins.
Et les élèves, accompagnés par les syndicalistes, pourront se déterminer davantage par rapport à leur futur professionnel, plutôt que dans leur rapport à l’école.
De la sorte, l’école ne serait plus si exclusive dans la détermination de la socialisation.
La vie « réelle », professionnelle, sociale, concrète, pèserait davantage au côté des résultats scolaires.
L’école apparaîtrait mieux comme un instrument, que comme un juge qui distribue les futures situations sociales.
Cela libérerait ainsi les enseignants de la responsabilité quasi-exclusive de la socialisation des enfants… qu’ils n’ont pas les moyens d’assumer.
La collaboration syndicalistes-enseignants pourrait être à mon avis, extrêmement féconde.

Dans la phase de développement l’école apportait un plus, soit par l’alphabétisation et l’instruction de base, soit en sélectionnant les élèves vers des études supérieures, et une promotion sociale.
Dans cette phase-là, l’école était une institution qui portait par elle-même, la promotion des élèves… à différents niveaux.
Dès lors que la totalité des enfants poursuit des études, elle ne porte plus cette promotion parce qu’elle ne peut plus sélectionner… sauf en déclassant les élèves en son sein.
L’erreur a été jusqu’ici de continuer à attendre que l’école continue à promouvoir, alors qu’elle n’était plus en situation de le faire… : à force certaines catégories d’élèves en acquièrent le sentiment… et décrochent.

Il revient à la société elle-même de prendre le relais de la socialisation des enfants, par un travail de solidarité interne, en encadrant et en accompagnant les enseignants.
De cette manière, les enseignants ne seront plus perçus par les élèves comme des agents de l’État leur faisant subir leur arbitraire, mais comme des agents sociaux égaux à eux-mêmes.
L’État, dans sa position de surplomb, a perdu son autorité, en perdant son efficience.

Dans ce nouveau schéma, l’école n’est plus une institution étatique autonome, mais un instrument dont la société,  – pas l’État – , se sert pour assurer la formation et la socialisation de ses enfants.
Pour que la société soit en mesure d’assumer cette nouvelle responsabilité, il faut que sa composante principale, qui peut représenter l’intérêt général, y soit habilitée et structurée en conséquence.
Avec les syndicats en cheville ouvrière, le salariat solidaire répond à ces exigences.

Il faut que les syndicalistes soient en mesure et en situation, de faire les choix qui conditionnent le devenir de l’ensemble du salariat.

Après le collège, on se rapproche de la formation professionnelle.

En représentant le salariat qui représente lui-même 90% de la population active, les syndicats sont au cœur de l’activité professionnelle, et donc les plus à même d’en conduire la formation.
En étant responsables collectivement du salariat, ils connaissent tous les aspects de l’exercice professionnel du point de vue du salarié, en même temps que de celui des entreprises.

 

                    2° Point : La formation professionnelle et l’Université.

Les syndicats ont pris la responsabilité de l’emploi en prenant la maîtrise de la mobilité salariale : pour pouvoir l’assumer, il leur faut en maîtriser tous les paramètres.
– Le premier est celui de la formation professionnelle, primaire d’abord, puis continue, pour permettre l’adaptation permanente des salariés.
– Le deuxième est celui de la vision prospective de l’évolution de l’emploi, par celle de l’évolution de la société et donc de l’économie.

Pour ce faire il leur faut prendre le contrôle, avec tous leurs financements, d’abord de tous les instruments de la formation professionnelle, puis aussi des formations et de la recherche universitaires,
– pour qu’ils puissent se projeter dans l’avenir plus ou moins lointain,
– pour anticiper les évolutions, les mutations sociales et économiques,
– pour s’y préparer, et entraîner l’ensemble des salariés dans le mouvement du monde, sereinement, et en sécurité, pour tous.

Comme l’école primaire et secondaire, l’Université devrait être contrôlée par la société, et non par l’État, pour que les citoyens prennent la responsabilité d’eux-mêmes, et de leur avenir.
Lorsque c’est l’État qui est responsable de l’Université, les citoyens sont en position de mineurs à qui on accorde, ou pas, ce qu’ils demandent. Ils sont mis en position de revendication permanente : ils revendiquent donc.
Cette position de mineurs les empêchent de se rendre compte que leurs revendications ne pourraient être satisfaites, que par eux-mêmes ! Mais dans leur position de mineurs, ils ne décident pas.
Structurée comme elle l’est actuellement, la société n’a pas les ressources pour prendre la responsabilité de l’Université.
Le salariat collectivement solidaire aurait ces ressources.

Encore une fois, c’est la substitution de l’État par la société, qui apporterait la solution.
Cette substitution ne peut se réaliser que si une des composantes de la société est assez importante pour pouvoir en représenter l’ensemble, et suffisamment cohérente et solidaire.

L’arrogance des politiques repose sur l’omnipotence de l’État.

Cette omnipotence leur donne le sentiment qu’ils peuvent, et doivent, décider de tout…
Mais cette omnipotence est très largement, et de plus en plus, impuissante : alors ils font semblant, pour satisfaire les électeurs… qu’ils ne satisfont pas.
Le sentiment monte, d’un monde menaçant, non maîtrisé, agressif.
Alors les citoyens demandent à l’État plus de protection, que les politiques n’ont pas les moyens de leur donner, sauf à quelques privilégiés, de moins en moins nombreux.
Et l’angoisse croît.

L’incapacité des politiques à reconsidérer leur rôle, celui de l’État, des institutions étatiques, en correspondance à celui des différentes composantes sociales, est à la base du marasme actuel.
La baisse relative de l’importance des États par rapport aux autres acteurs mondiaux les prive de leurs capacités d’interventions.
En conséquence de quoi, le rôle des politiques est de plus en plus un rôle d’animation, plutôt que de décision.

Au nom du salariat, les syndicats devraient prendre le contrôle de l’université, et de la recherche.
A la différence des politiques soumis à la dictature du suffrage universel, et donc à la nécessité d’obtenir le soutien des électeurs, toujours sur des sujets de préoccupation immédiate… à la différence des entreprises aussi, soumises elles, à la dictature du résultat financier immédiat,
A leur différence, les syndicats auraient la permanence et la continuité pour en assumer la responsabilité, dans le temps long.

Les différentes institutions ont chacune leur propre rythme :
– Les entreprises, en concurrence entre elles, doivent toujours assurer leur résultat à court terme, pour pouvoir envisager de durer. Cet impératif pèse sur leurs décisions, même si elles ont des projets à long terme.
– Les politiques, en démocratie, sont soumis aux aléas des élections, régulières, qui peuvent interrompre leur exercice du pouvoir. Pour se faire élire, contre leurs concurrents, ils doivent répondre aux doléances immédiates des citoyens dont la satisfaction peut être contradictoire à celle du long terme.
– Les syndicats, représentants de la composante sociale centrale, collective, massive, ont la durée qui fait défaut aux autres. Mais il leur faut remplir plusieurs conditions :
1 Il faut d’abord qu’ils soient plusieurs, pour qu’il puisse y avoir débat, et choix.
2 Que le choix de leurs dirigeants émane des salariés adhérents comme actuellement, et non du suffrage universel : ce qui les mettraient dans la même situation que les politiques.
3 Qu’ils soient généralistes, pour qu’ils soient en mesure d’intervenir dans tous les secteurs de la société.
4 Qu’ils couvrent l’ensemble du territoire pour prendre en compte l’ensemble des besoins du salariat.

 

                                 3° Point: La création d’entreprises et d’activités

Après la maîtrise de leur mobilité, celle de leur formation professionnelle, il faut que les salariés, collectivement, maîtrisent la création d’emplois qui les concernent.
Ils doivent avoir une capacité d’initiative, d’intervention et d’orientation dans la création d’emploi, mais sans interférer avec les entreprises.
Il faut qu’au nom de l’ensemble du salariat, les syndicats aient une capacité d’initiative pour contribuer à construire la société en devenir, en tant que composante sociale collective, pour se substituer aux instances étatiques extérieures à la société ; et aussi pour ne pas laisser toute l’initiative aux entreprises privées qui, elles, ont une détermination individuelle.

Il faut donc que les syndicats aient une capacité d’investissement qui allie :
– le collectif de la composante sociale qu’ils représentent,
– et l’individuel de l’efficacité économique.
– Le collectif pour instaurer la solidarité organique du salariat dans sa projection vers l’avenir.
– L’individuel, parce que l’efficacité économique réside dans la concurrence individuelle.
Sans l’individuel, le collectif perdra son efficacité économique…
et les syndicats perdront leur capacité d’intervention économique.
Sans le collectif, l’individuel perdra sa solidarité (collective)…
et les syndicats perdront leur capacité d’intervention sociale.

Pour allier les deux, je propose une contribution générale, proportionnelle au revenu, de tous les citoyens.
Chaque citoyen, individuellement, choisit -1- syndicat, à qui il confie sa contribution.
Cette contribution qui reste la propriété de l’individu-citoyen,
devient un capital,
que le syndicat de son choix devra obligatoirement investir dans la création d’entreprises ou d’activités pour le besoin qu’il aura recensé.
Ce capital, comme tout capital, générera un profit qui en mesurera la rentabilité, c’est à dire l’efficacité de l’investissement.

En fonction de cette rentabilité, le contributeur, propriétaire de ce capital, pourra à tout moment changer d’attributaire… dans un délai à prévoir.
Ce qui obligera le syndicat à être performant.
D’où la nécessité que les syndicats soient plusieurs,
– pour permettre le choix,
– pour pouvoir choisir les bonnes pratiques, éliminer les mauvaises, non sur des critères à priori, théoriques ou autres, mais sur les critères économiques des résultats réellement obtenus,
– mais surtout pour pouvoir comparer et pouvoir inventer.
Il faut absolument que cette possibilité de choix existe, et que ce choix soit sanctionné par un résultat suscitant une réaction… sinon, cet abondement financier serait sans contrôle, et perdu.

Il s’agit d’instaurer la solidarité collective dans l’investissement, qui n’existe actuellement ni dans l’investissement privé, ni dans l’investissement public, parce qu’il n’est pas social.
Cet investissement social, collectif, solidaire, ne s’oppose pas aux autres, il s’y ajoute.
C’est un investissement collectif d’orientation, de ré-orientation, qui entraînera les investissements privés vers les besoins, définis collectivement, et non-plus seulement par le marché… mais qui devra vérifier son efficacité par le marché :
– Un investissement qui n’est pas rentable, est un investissement gaspillé.
Or ce capital proviendra essentiellement des salariés… qui ne voudront pas qu’il le soit.

De cette manière, on introduit l’intérêt et la responsabilité individuels, dans l’action collective.

En fonction de l’état de l’emploi et de leurs prévisions, dans chaque bassin, avec cette ressource, les syndicats auront la capacité d’orienter la structuration économique selon leur intérêt collectif et selon leurs choix.
Ils seront ainsi en capacité d’influer sur le développement de la société.
Mais ils le seront en tant que responsables.
Responsables de l’emploi, des carrières professionnelles, responsables de la solidarité collective.
Responsables de l’ensemble du salariat, face à l’avenir, face à l’évolution du monde.

Les syndicats exercent une responsabilité collective, ils n’ont donc pas la qualité pour participer à la gestion des entreprises qui requiert une responsabilité individuelle.
Les entreprises sont des entités individuelles parce que, pour être performantes, efficaces, elles ne doivent considérer que leur intérêt propre : les décisions qui les concernent doivent donc être de nature individuelle.
De toutes façons, si les syndicats participaient à la gestion des entreprises, ils se retrouveraient en position de conflit d’intérêt entre :
– 1 l’intérêt des salariés de l’entreprise, qui est pour ces salariés un intérêt de solidarité grégaire.
– 2 l’intérêt général de la solidarité collective de l’ensemble du salariat.
Ils seraient amenés à renoncer à la solidarité collective (intérêt général),
au profit de la solidarité grégaire des salariés de l’entreprise en question (intérêts particuliers).
Et toute l’efficacité de la nouvelle institution serait perdue.

Les entreprises crées par les syndicats seront donc dirigées par des chefs d’entreprises comme les autres, avec les mêmes impératifs et les mêmes contraintes.
Mais les syndicats seront actionnaires…, et à ce titre, leurs exigences de conditions de travail, d’égalité… devront être prises en compte, dans la limite de la compétitivité.
Il faudra que le management qu’ils proposeront soit plus performant du point de vue des salariés…
Ils seront peut-être amenés à former des chefs d’entreprises, afin qu’ils sachent prendre en compte les besoins des salariés au sein de l’appareil productif…
Couplé avec la maîtrise de la mobilité, cette disposition leur donnera les moyens de l’exiger…
Mais toujours dans le cadre de la concurrence, qui reste le moyen de demeurer dans la réalité économique.
Ceci les obligera à être inventifs en ces matières : ce qui pourrait les amener à revaloriser certains métiers aux dépens d’autres, pour rétablir une certaine justice entre les salariés…

En maîtrisant à la fois : la mobilité salariale, la formation professionnelle et la recherche, et l’investissement à titre collectif, les syndicats auront les moyens de combattre et de remédier à l’inégalité entre les salariés.
Je pense que l’inégalité absurde, mortelle et croissante qui envahit le monde, repose sur l’inégalité entre les salariés.
L’inégalité entre les salariés autorise toutes les autres formes d’inégalité.
Ou pour le dire autrement, en maîtrisant l’inégalité au sein du salariat, on maîtrise l’ensemble des inégalités.

Comme sur un autre plan : la maîtrise de soi conditionne la maîtrise des relations à autrui.
Tant que le salariat ne maîtrisera pas son inégalité interne, l’inégalité du monde ne sera pas maîtrisée.
Je rappelle que le salariat représente 90% de la population active, et que le système économique capitaliste dominant repose sur le salariat.

Ce capital, collectif en quelque sorte, non dans sa propriété mais dans sa maîtrise, impliquera chacun dans la politique d’investissement du pays, avec une série de conséquences :
– La contribution de chacun contribuerait à étendre la propriété du capital à l’ensemble de la population.
– Ce capital maîtrisé collectivement pour être investi, ne serait pas soumis à la spéculation.
– Par lui on pourrait augmenter l’investissement, sans passer par les incitations fiscales ou autres… et anticiper celui de l’intérêt privé…, le susciter.
– On pourrait par exemple construire des logements sociaux, parce que ce capital échapperait à l’incitation individuelle du rendement.
– Par ce biais, la propriété du capital se diffuserait à toute la population, tout en demeurant hors de la spéculation individuelle.

Cette propriété collective du capital, non en titre mais en usage, pourrait permettre de développer la notion de responsabilité de l’investissement pour l’avenir, dans l’ensemble de la population.
Au contraire d’aujourd’hui, où l’immense majorité des citoyens attend que ses désirs soient satisfaits… par d’autres, qui décident.
Tout mon projet consiste à instituer une responsabilité sociale collective,
c’est à dire que les responsabilités individuelles s’associent, s’articulent et se fondent pour créer et maîtriser le réel vécu.
De cette manière, en acquérant la maîtrise du réel par la solidarité collective les individus, tout en gardant leur liberté, auraient le sentiment de ne plus être seuls face au monde : ils retrouveraient ainsi le sentiment de sécurité que la fin de l’État-Providence leur a fait perdre.
Ils auraient ainsi les moyens de faire face à la mutation du monde, et d’accepter les changements qui leur permettraient de s’y adapter.
Ce sentiment de leur sécurité est fait à la fois de la solidarité collective qui permet de ne pas être, et se sentir abandonné… et d’une capacité active, prospective, de déterminer le futur qui nous concerne.
Le patronat ne serait plus seul à représenter la production.
À la place qui est la sienne, il a naturellement tendance à tout subordonner à son outil de production, à ne considérer les individus qu’en fonction de leur utilité pour l’entreprise : producteurs ou consommateurs.
Dans le prisme de sa vision prééminente, il conçoit d’abord ses outils de production et exige ensuite que les salariés s’y conforment.
De cette façon, économique, le patronat détermine l’identité sociale du salarié, sans que celui-ci n’aie rien à dire.
En intervenant dans le domaine économique, les syndicats donneront aux salariés la capacité d’élaborer eux-mêmes leur propre identité sociale.


                                      L’institutionnalisation du salariat

Les institutions correspondant à ces nouvelles fonctions et responsabilités des syndicats représentant le salariat, doivent être mises en place pour assurer leur visibilité, leur légitimité, leur indépendance, leur pouvoir, leurs moyens financiers, et leur contrôle par le pouvoir politique.

Il faut instituer un parlement salarial.
Y seront représentés les syndicats généralistes, capables d’intervenir dans tous les secteurs d’activités, et dans toutes les régions, pour être en mesure de répondre à l’ensemble des besoins des salariés.
Il faut que ces syndicats soient plusieurs, et distincts, pour qu’il puisse y avoir débat public, puis choix.

Étant donné que les sommes financières seront gigantesques,
– il faut que leur utilisation soit publique,
– que la presse puisse en rendre compte, et la contrôler,
– que les différents services de l’État exercent leur contrôle,
– que le débat soit public, pour que les différents choix des différents syndicats soient soumis à l’appréciation du public, des citoyens, des salariés.
En résumé, il faut que les syndicats répondent de leur action, non-plus seulement devant leurs adhérents, mais aussi, face à l’ensemble de la nation, avec tous les contrôles démocratiques afférents.

Je redis ici que les responsables syndicaux ne doivent pas être élus au suffrage universel : ce qui les feraient tomber dans les travers de l’électoralisme politique, qui les empêcherait d’assurer la continuité de l’intérêt salarial, donc général…
mais doivent être désignés par leurs pairs, dans leurs procédures propres.

Le suffrage universel est réservé à l’instance politique, qui chapeaute et contrôle l’ensemble des institutions démocratiques.

Étant donné que les syndicats contrôleront la mobilité de l’emploi, la formation professionnelle, l’orientation scolaire, l’Université, et la recherche… il faut que leurs décisions soient prises lors d’un débat public que l’ensemble de la population puisse suivre.
Il faut aussi que les résultats de cette action soient évalués, comparés… pour pouvoir ré-orienter l’action si nécessaire.

En tant qu’institution majeure, il faudrait que ce parlement salarial contribue au contrôle et aux nominations des différentes instances publiques : magistrature, organes de presse, entreprises publiques… pour ne plus laisser le pouvoir politique, avec ses clivages politiciens, en décider seul.
Il participerait ainsi à l’équilibre des pouvoirs, au sein de la société démocratique.
Il contribuerait à la liberté et l’indépendance de la presse.
Il contribuerait à l’objectivation des faits… et à la distinction de ces faits, de leur analyse ou de leur commentaire.

Les syndicats sont la cheville ouvrière du salariat.
Leur action se passera à l’intérieur des entreprises, mais plus encore en dehors d’elles… dans toute la société.
C’est en amont et en aval de l’emploi que se situera l’essentiel de leur action, et c’est cette action et cette maîtrise sur l’amont et l’aval, qui influera sur l’emploi lui-même… qui reste, au sein de l’entreprise, sous la responsabilité et les prérogatives du chef d’entreprise.

Par la maîtrise de la mobilité de l’emploi :
– ils assureront la sécurité de l’emploi pour tous,
– ils exerceront une force solidaire, de nature centripète, qui ré-incluera dans le système économique et social, ceux qui aujourd’hui sont marginalisés, relégués, exclus, dé-socialisés par la force grégaire centrifuge,
– ils auront les moyens de revivifier les zones, régions, secteurs, ou autres… qui en auront besoin selon une analyse collective et prospective…

En charge de l’orientation scolaire vers la formation professionnelle, ils auront un rôle d’accompagnateurs et de tuteurs auprès des enfants, des élèves… en charnière entre :
– l’école et la carrière professionnelle,
– l’école et les enfants,
– l’école et les parents.
Étant donné que les syndicats travailleront aussi avec les parents pour leur emploi et leur carrière, leur action auprès des enfants aura un caractère d’égalité par rapport à leurs parents…

Ce positionnement de charnière, cette action globale et cohérente, cette maîtrise de l’emploi… donnera aux syndicats la capacité,
– de reconquérir, de reconstruire une autorité adaptée au stade de l’évolution de notre société.
Les instances étatiques ont perdu la capacité de produire et d’incarner l’autorité.

Parce que, après l’avènement de la légitimité de l’individu, dans leur position de surplomb par rapport à la société, elles ont perdu leur capacité socialisante.
L’autorité sera ainsi reconquise, reconstruite, ré-élaborée, par les instances sociales, dans un nouveau paradigme.
Puis l’État, les instances étatiques, enregistreront, refléteront, entérineront ce nouvel équilibre social.
Cette réforme, par l’institutionnalisation du salariat, dés-étatisera et socialisera la construction de la société qui aura ainsi les moyens de sa propre maîtrise.

 

                                     Reconquérir l’autorité

Un âge de l’autorité, celui des institutions « d’autorité »:
armée, police,
père de famille,
chef dans l’ordre politique,
maître dans l’ordre du savoir,
magistrat dans l’ordre de la loi,
… cet âge venu du plus profond de l’histoire humaine a vécu.

Cette autorité reposait sur la tradition et la religion :
L’obligation envers le surnaturel ou l’originel a ceci de remarquable qu’elle appelle une soumission sans réserve, tout en excluant idéalement le recours à la coercition.
En quoi l’assujettissement religieux ou la dépendance envers la tradition offre le type pur du rapport d’autorité.
En quoi ils se désignaient eux-mêmes comme les cibles d’élection de la modernité autonome, comme les repoussoirs contre lesquels elle s’affirme et se définit.

La progression de l’individualisme dans l’évolution des sociétés modernes a relâché l’encadrement autoritaire religieux et traditionnel… en même temps que progressaient les idéologies raciste, nationaliste, colonialiste, antisémite.

À la suite des abominations des 2 guerres mondiales, de l’entre-deux guerres, et croisé avec la diffusion de la psychanalyse, une vaste enquête analyse les méfaits d’une prime-éducation répressive,
qui produit des individus à la fois soumis et sadiques,
aussi disposés à une obéissance pathologique, qu’animés par une agressivité destructrice.
« La personnalité autoritaire » d’Adorno, publié en 1950 aux États-Unis est l’ouvrage qui illustre le mieux cette approche.

La recherche à la fois sociologique et psychologique a diagnostiqué la nécessité de promouvoir la responsabilité individuelle, et donc l’éducation à cette responsabilité,
qui suppose la liberté et la légitimité des individus, et donc celles des enfants.
Il faut bien voir, avec le recul, que ces recherches socio-psychologiques s’inscrivent dans le progrès de l’individualisme, qui les portent.

Après s’être développé dans les cercles de réflexion, à partir de 1968, le sentiment de la légitimité de chacun s’est diffusé dans toute la société.

1968 est la date charnière de la fin de l’âge des institutions d’autorité… et du début de la légitimité individuelle généralisée.

La société autoritaire était hiérarchique, donc inégale : l’inégalité y était légitime.
La promotion de la légitimité individuelle a produit la légitimité de tous.
Et la légitimité de tous ne peut être qu’égale entre chacun, et donc pour tous.
Et l’égalité entre tous repose sur la liberté de chacun.
L’autorité hiérarchique devient illégitime, car c’est l’égalité qui est devenue légitime.

Cette légitimité et cette égalité individuelles ont d’abord redéfini les rapports hommes-femmes, avec le développement du féminisme et celui de la parité. Entre adultes.

Et puis il a concerné les rapports parents-enfants, l’éducation, c’est à dire la socialisation.
L’autorité hiérarchique était devenue illégitime… et ne pouvait donc plus régir les rapports d’éducation, donc de socialisation.
La nouvelle légitimité individuelle nécessite un nouveau rapport d’éducation, qui pour l’instant n’a pas été inventé.

L’autorité repose sur la légitimité.
Cette légitimité est ressentie : c’est à dire que la légitimité est déterminée par ceux qui subissent l’autorité.
L’autorité ne peut donc être contrainte.
Ceux qui exercent l’autorité ne peuvent prétendre l’imposer.
Pour l’autorité hiérarchique d’autrefois qui reposait sur la religion et la tradition : cela allait de soi.
Aujourd’hui c’est terminé : il faut d’abord recueillir l’adhésion.

Les institutions étatiques fonctionnaient sur cette autorité hiérarchique… qui aujourd’hui n’est plus perçue comme légitime.
Sans légitimité, pas d’autorité !
Et sans autorité, on reste dans le rapport de force.
L’ensemble des institutions étatiques relèvent de cette autorité hiérarchique devenue illégitime : sans la légitimité de l’autorité, elles deviennent impuissantes.

C’est leur position de surplomb, dominante, qui n’est plus légitime, dans les nouveaux rapports sociaux égalitaires.

L’inadaptation de cette autorité hiérarchique de l’État, qui reposait sur l’origine et la religion, est flagrante à l’égard des jeunes des « cités » :
– ces jeunes n’ont pas la même origine, ni la même religion que celles sur lesquelles l’État s’appuie,
– au contraire, cet État les a autrefois colonisé.
Les jeunes des cités ont acquis comme les autres jeunes, le sentiment de leur légitimité, qu’ils investissent ailleurs sur d’autres supports (bande, cité…), et ne tolèrent pas cette autorité hiérarchique, surtout s’ils sont en difficulté de socialisation…

L’égalité et la liberté, seules légitimes aujourd’hui, seront la base de l’action syndicale, qui s’exercera dans tous les contours de la société, en son cœur, et non-plus en surplomb.
Elle sera l’action des citoyens eux-mêmes, et non celle des agents de l’État exerçant une autorité dominante, inégale.
Elle sera d’autant plus égale qu’elle prendra en compte l’intérêt de tous les citoyens, de tous âges, de toutes conditions, sans discrimination qui serait être humiliante.

 

                                      Reconstruire l’autorité

L’avènement de la légitimité individuelle est un événement qui remet radicalement en cause les conditions d’éducation et de socialisation antérieures : il faut en prendre conscience, sinon on restera déphasés et impuissants.

Ce qui a changé fondamentalement, c’est que l’autorité des parents n’est plus légitime en soi.
C’est une révolution !
Auparavant, les enfants devaient obéir à leurs parents, à priori. C’est une évolution : si on remonte assez loin, le père avait droit de vie et de mort sur ses enfants…
Aujourd’hui, ce sont les enfants qui sont légitimes (comme n’importe qui), à priori.
Transmettre l’ordre social, certes démocratique, dans ces conditions, est inédit.

La légitimité des enfants est basée sur leur liberté d’apprécier la valeur des injonctions qu’on leur impose.

Leur liberté doit donc être respectée.
L’éducation, socialisante, ne pourra dorénavant se faire que sur cette base.
Toute imposition autoritaire, hiérarchique, de valeurs morales, est devenue illégitime, et donc obsolète, donc inefficace.

Il faut donc concevoir une transmission des valeurs qui soit déterminante, sans être attentatoire à la libre appréciation des enfants.

Pour cela, au lieu de contraindre à obéir à des valeurs positives, il faut mieux interdire ce qu’il est impossible de faire.
Marquer la frontière entre ce qu’il est possible, et ce qu’il est impossible de faire.
L’interdit posé, l’enfant établit lui-même ses propres obligations positives correspondantes, dans l’expression de sa libre légitimité.

Progressivement, le respect de cet interdit deviendra pour l’enfant, la base de son sentiment de sa légitimité.
Et les valeurs positives de respect, d’harmonie, de convivialité, de coopération, de sociabilité, viendront s’adosser à cet interdit… qui deviendra ainsi la base de l’ordre social.
Le respect ne s’obéit pas… C’est l’irrespect qui s’interdit.

Les institutions étatiques avec leur autorité hiérarchique surplombante, sont inadaptées pour jouer ce rôle.

Le relais devra être pris par les institutions sociales
qui interviendront au cœur de la société, dans l’égalité de tous et de chacun.
Ce sont les syndicats qui piloteront cette action sociale, l’organisant, distribuant les rôles, la finançant. Ils pourront s’appuyer sur les associations…
En collaboration avec les collectivités locales, avec aussi les institutions étatiques… mais celles-ci n’auront qu’un rôle de collaboration :
L’initiative et la décision appartiendront aux institutions sociales.
Ceci est essentiel, il s’agit de comprendre pourquoi :

– L’autorité repose sur la légitimité.
– La légitimité est déterminée par ceux qui subissent l’autorité.
– L’autorité venue d’en haut n’est plus perçue comme légitime.
– Il faut donc que l’initiative et la décision de l’action sociale vienne de ceux qui subissent l’autorité pour qu’ils en établissent la légitimité.
– Une fois la légitimité établie socialement, les instances étatiques : État, Parlement, Justice, Police…, ratifieront, entérineront les décisions, en les légalisant.
– En intervenant à posteriori, la loi reconnaît l’autonomie de la société.
– Ce sont bien, toujours, les instances étatiques qui feront la loi, mais seulement après que la société les aura élaborées.
– De cette manière, la légitimité aura d’abord été établie par la société elle-même, la loi venant ensuite sanctionner ses décisions…
– Ces décisions légitimes pourront être mises en œuvre.
– L’autorité fonctionnera à nouveau.
– Les instances étatiques pourront à nouveau jouer leur rôle, mais en position de ratification de l’initiative sociale.

C’est un changement capital par rapport à ce qui se passe aujourd’hui.
C’est un changement qui effectue l’évolution de la société :
L’autorité hiérarchique des instances étatiques correspond à l’état de la société où son organisation était grégaire, différents groupes avec différents droits, statuts, la constituaient.
Depuis l’avènement de l’individualisme, l’État aurait dû évoluer vers une structure qui reconnaisse l’autonomie solidaire de la société, en l’organisant.

Au lieu de cela, les politiques n’ont fait qu’aggraver l’emprise de l’État, réduisant encore l’autonomie de la société, sauf pour les entreprises :
Après la construction de l’État-Providence…, Chirac a créé l’ANPE en 1975, Rocard a créé le RMI, Jospin la RTT, Martin Hirsch le RSA… et la présidencialisation du régime par Nicolas Sarkozy est une étatisation encore plus flagrante.
Cette étatisation a progressé pendant que l’autorité hiérarchique des instances étatiques s’effondrait : les politiques prennent des décisions, votent des lois, des lois… imposant des arbitraires qui apparaissent de plus en plus comme des caprices présidentiels…, comme des passe-droits, des privilèges accordés à certains, dans une agitation frénétique, pendant que l’ensemble souffre.
Il en résulte un sentiment d’illégitimité croissante, qui aboutit à l’impuissance.
Il s’agit de renverser cette déliquescence… et restaurer la légitimité.


                                                           Conclusion

Vous vous en êtes rendus compte, je n’ai pas proposé de politique économique et fiscale précise pour répondre à la situation actuelle…
Je n’ai parlé ni de l’enjeu écologique, ni de l’endettement, ni de la relativisation de la puissance de l’Europe, de l’équilibre géostratégique, de l’équilibre démographique, notre vieillissement…
Là n’était pas mon propos.

Mes propositions visent à rendre les conditions sociales adéquates, pour que la société soit en mesure d’affronter et d’assumer les défis qui se posent à elle, à nous.
Ces conditions sont adéquates dans la mesure où elles prennent en compte le degré d’évolution de la société.
Ce qui n’est pas le cas actuellement.

Actuellement, la société est traitée en mineure.
L’État, les politiques, les instances étatiques, décident pour elle.
Et les instances sociales acceptent ce statut de mineur.
Ces instances, les syndicats par exemple, revendiquent, réclament, exigent… auprès de leurs tuteurs : patronat, gouvernement, État…,  qu’ils leur accordent des avantages, des droits, des progrès… comme des enfants… mineurs.
Il ne vient jamais à l’idée de ces syndicats : de faire, d’accorder, d’être en position de faire et d’accorder, de « s’accorder ».
Il ne leur vient jamais à l’idée d’en prendre la responsabilité, le pouvoir.
De revendiquer cette responsabilité, ce pouvoir.

L’État reflète les différentes composantes sociales :
Il reflète donc cet état de « minorité » de la société.
Il reflète la force des entreprises, des banques, du système financier…
Il reflète aussi la faiblesse divisée, grégaire, du salariat, qui se complaît dans sa faiblesse.

Lorsque le salariat abandonnera son grégarisme, et s’unira dans la solidarité collective, il deviendra puissant, en devenant responsable.
À ce moment-là, l’État reflétera sa puissance aussi : il deviendra capable de défendre ses intérêts, face aux autres.
C’est à l’État qu’il revient de le restructurer et de le contrôler.

Les défis que nous avons à relever sont gigantesques :

– L’emprise écologique : nous sommes au bout du développement économique tel qu’il s’est déroulé jusqu’à présent… et d’autant plus rapidement que les pays pauvres se développant, ils accélèrent le rapprochement de la fin.
Les changements à accomplir pour que la planète survive sont radicaux et colossaux.
Pour réaliser ces changements, c’est une autre société qu’il faut construire, or nous sommes endettés…

– L’endettement et le vieillissement : ils sont liés parce qu’en étant nombreux à vieillir, nous sommes à la charge des actifs de moins en moins nombreux, alors que la charge de la dette pèsera sur eux…

– La Chine, l’Inde, l’Afrique, l’Asie, l’Amérique latine… enfin tout l’ancien Tiers-Monde, monte en puissance. Notre puissance européenne se relativise.
De plus en plus nous serons en concurrence avec eux qui ont des salaires beaucoup plus bas que les nôtres : ce qui va peser lourd sur nos emplois.
D’autre part, une assez importante partie de notre consommation est constituée de produit venant de ces pays à bas salaires. En se développant ces pays augmenteront leurs salaires, les prix de ces produits augmenteront donc : cela représentera une perte de pouvoir d’achat…

Il faut concevoir cette évolution comme une transition : d’ici 50 ans on y verra plus clair.
On pourrait se retrouver à égalité avec toutes les autres parties du monde.
En tous cas, c’est ce qu’il faut viser pour ne pas s’illusionner.

La souffrance qui nous attend pour cette adaptation va être multipliée.
Si nous gardons notre système social actuel, la situation des plus faibles s’aggravera encore.
La constitution du salariat en entité collective solidaire permettrait d’affronter ces difficultés dans la sérénité, dans un effort partagé, en sécurité, et dans un progrès commun et collectif.

Il m’insupporte de toujours entendre que nous devrions accepter de subir la réalité du monde tel qu’il est…
Nous sommes le monde : il nous appartient de le construire à notre convenance.

Il s’agit d’accomplir la réalisation de l’évolution sociale initiée par l’avènement du salariat… jusqu’ici inaboutie.

L’avènement du salariat a suscité le développement de l’individualisme.
L’individualisme est fondé par l’affirmation et la promotion de la valeur de l’individu en soi, de sa légitimité en soi, et de sa liberté.

La liberté fonde la légitimité des individus… et les fait échapper à toute autre forme de légitimation (origine, religion, famille… et toutes formes de grégarisme).

Cette légitimité fondée sur la liberté, à son tour, est la base de la responsabilité de l’individu.
L’individu est donc responsable parce qu’il est légitime, et qu’il est légitime parce qu’il est libre.

L’individu seul est isolé.
Isolé, il est impuissant.
C’est par la solidarité collective que l’individu peut exercer sa liberté, pour construire le monde.
Mais cette solidarité collective n’existe que par l’existence des individus libres, donc légitimes, donc responsables.

La liberté est la plus grande exigence qui soit.

PS : si vous estimez que les propositions de cette chronique valent d’être proposées à la discussion, partagez-les, diffusez-les… Merci.
Jean-Pierre Bernajuzan

 

21 commentaires sur “LA RÉFORME DU SALARIAT

  1. J’admets que je n’ai pas pris le temps de tout lire.Cependant il me semble que vous mettez bien le doigt là où çà fait mal. Ce sont bien en parti les salariés eux mêmes qui excluent les plus fragiles. En rejetant sur les plus fragiles les difficultés liées aux crises, tout en s’en préservant eux même par le biais de statuts privilégiés, ils s’en servent, eux aussi, comme variable d’ajustement
    Au bout d’une longue route semée d’embuche, je suis devenu fonctionnaire, mais je suis toujours en but avec mes collègues, eux pensent qu’il faut défendre la retraite, moi, je dis qu’il faut que tout le monde ait un travail afin qu’on puisse la financer.
    Evidemment ils ne comprennent pas mon discours, et dés qu’ils entendent l’annonce d’un plan social à la radio, çà les fait sourire. Alors que faire ? Les virer à leur tour ?
    Parfois, j’en rêve, peut être que çà changerait leur vision de la lutte sociale… Tcaron

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  2. Bonjour

    J’ai passé la soirée d’hier à lire votre long travail d’analyse et de proposition « Réforme du salariat ».
    J’ai pris des notes, puis reconstitué sa structure.
    Sans flagornerie : fond et forme m’ont intéressés et ont ma sympathie.

    Sur la forme : Le souci de clarté transparaît en permanence, qu’il s’agisse de la mise en page, du ton, du choix du vocabulaire (accessibilité) comme de la structure.

    Sur le fond : Beaucoup de choses. Pour aujourd’hui trois points :

    Ok sur l’analyse du passé :
    C’est la première fois que je vois utiliser grille d’analyse social/économie comme vous le faites. C’est peu connu. Cela recoupe nombre de mes observations. Cela aboutit à un diagnostic pertinent et opérationnel. Cela le rendra-t-il convaincant et ne sera-t-il pas saisi par ceux qui le liront comme une nouvelle illustration de la lutte des classes. ?

    Sur votre proposition de rupture conceptuelle :
    Innovant. Accessible, bien expliqué, pourrait convaincre car ne s’appuyant délibérément pas sur la recherche véhémente de coupables. C’est aussi une de ses faiblesses tant nous sommes habitués à ce type de démarche consistant à agir « contre ». Mais vous n’en êtes pas responsable.
    Quid de la diffusion et de l’acceptabilité d’une telle démarche ? Aujourd’hui je vois une pente bien raide à gravir. Institutions, corps sociaux et individus ne fonctionnent pas sur ce schéma, comme vous le dites ci justement d’ailleurs me semble-t-il.

    Sur vos « prescriptions » Mobilité, formation, université, recherche, création d’emploi, investissement, propriété du capital, autorité légitime … :
    La plupart des champs de l’action publique sont traités.
    L’ensemble est cohérent (articulé, s’entre-étayant).
    Mais quel risque de parler « syndicats » !
    Non pas que je conteste le rôle que vous souhaitez voir jouer à une structure de cet ordre. Je pense que c’est le vocable qui peut nuire à la thèse.
    Mes expériences de la plupart des milieux sociaux (8 employeurs, secteur public, privé et libéral, de la banque à l’insertion sociale via l’immobilier, les organisations professionnelles et la formation) me font penser que le mot « syndicat » est dévalorisé dans à peu près toutes les couches de la population. Sa perception souvent non explicite oscille entre : rassemblement minoritaire d’agitateurs corporatistes déguisés en révolutionnaires irresponsables et ramassis d’embusqués irresponsables prêts à toutes les signatures. Gardez le concept, changez l’emballage. Excusez moi, j’y vais fort, c’est pour la clarté de l’exposé. Vous trierez

    J’ai vu passer votre texte par tranches et vous prie de m’excuser de ne l’avoir pas lu alors. Je n’avais bien creusé qu’un texte traitant de l’autorité légitime et l’ai d’ailleurs rangé parmi les papiers que je recommande à l’occasion. Il avait contribué à renforcer un pan de mes réflexions sur l’acceptation citoyenne des contraintes collectives.

    Je croise souvent vos réactions sur Le Monde.fr. Je me les expliquerai désormais mieux, ayant le moyen de les inscrire dans une réflexion plus globale.

    Il y aurait tant encore à dire au sujet de votre travail.
    Effet du temps qui passe ? Il me faudra encore du temps pour l’assimiler.

    En toute hypothèse : merci et bravo

    A vous relire

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    1. Merci Gaëtan,
      votre commentaire est le premier témoignage que je reçois d’une lecture en profondeur.
      En effet, mon entreprise était une gageure sur un site où l’on papillonne, où l’on surfe, sans jamais approfondir; où l’on critique sans cesse, sans jamais proposer d’alternative… ou alors non viable.
      Aussi me devais-je de publier ces propositions pour promouvoir un esprit de construction.
      Et ainsi mettre au pied du mur les critiqueurs patentés : Que proposez-vous ?
      Les critiques que l’on émet dans le souci et la perspective d’un futur viable diffèrent des autres.
      Car si on propose des alternatives non-viables, c’est la réalité actuelle qui continue.
      La réalité a pour elle sa force d’inertie.
      Et pour la remplacer, il faut d’abord imaginer la réalité future.

      Je ne l’ai pas réaffirmé dans cette chronique, mais je dis que la – compétence – n’est pas un critère de décision, elle est un critère d’exécution.
      La preuve en est qu’il existe des compétents de tous bords, et que pourtant, ils ne proposent pas les mêmes solutions…
      La compétence s’appuie sur la connaissance : donc sur la connaissance de la réalité déjà présente :
      Si on prend la compétence comme critère de décision, elle ne saura que reproduire la réalité présente.
      Les compétents peuvent bien être imaginatifs, mais s’ils justifient leurs inventions par leur compétence, il s’agit d’une imposture…
      La compétence est une question cruciale, car la décision, particulièrement démocratique, nécessite la légitimité, le sentiment de la légitimité…
      Et celle qu’apporte la compétence est en l’occurrence une imposture.

      Pour ce qui concerne les syndicats, je suis bien d’accord avec vous : ils sont discrédités.
      Mais qu’on change leur nom n’y fera rien : c’est bien à cet endroit-là de la structure sociale que l’on peut, et que l’on doit agir efficacement, que l’on peut mettre en œuvre la solidarité collective que je préconise.
      C’est la pratique syndicale qu’il faut changer.
      Il n’est pas judicieux de ne pas nommer… ce que l’on veut changer.
      Mon propos consiste à délégitimer la pratique syndicale actuelle, pour en proposer une autre, qui à mon avis serait adéquate.

      J’attire votre attention sur la distinction que je fais entre la solidarité grégaire et la solidarité collective : c’est un angle d’attaque essentiel contre la pratique syndicale actuelle.

      Je sais qu’il est difficile d’assimiler une nouvelle manière de penser, une nouvelle appréhension de la réalité… je sais.
      Mais il faut bien l’émettre pour pouvoir envisager qu’elle remplace l’ancienne.

      à vous lire

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  3. Pffiou ! Le commentaire est bien long, j’ai pas pu tout lire… Il y a eu plusieurs fois où je me suis demandée de quel bord vous êtiez ; j’ai failli lacher.

    Mais l’analyse est vraiment intéressante et les propositions séduisantes. Je suis d’accord avec le message précédent sur l’utilisation du terme « syndicat » qui donne beaucoup d’urticaire.

    Cependant, si je peux me permettre, je n’ai rien vu sur la notion d’échelle : vous paraissez parler à l’échelle nationale tout du long mais il m’aurait paru cohérent avec vos propositions d’Etat animateur de valoriser d’autres échelles d’animations de territoire… Qu’en pensez-vous ?

    Sinon, il y a pleins de jolies choses dans votre texte et dans votre « tête » ; merci de les avoir partager ; ça fera son chemin.

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    1. Bonjour matild,

      ma proposition consiste à réformer le système social, où s’exerce la solidarité.
      Il comprend la sécurité sociale, l’éducation, les retraites… et le système fiscal qui organise cette solidarité.
      Cette solidarité s’organise au niveau national ; on peut observer que chaque pays s’organise différemment, même au sein de l’Union Européenne : c’est donc à l’échelle nationale que je préconise ma réforme. Avant d’envisager son extension vers une plus grande échelle, il faut d’abord en vérifier la pertinence et l’efficacité pour rester dans le concret possible. Si l’efficience en est vérifiée, on pourra alors la proposer au delà du niveau national : son efficience vérifiée la rendant désirable. Si elle n’est pas efficace, il n’est pas utile de l’étendre à une plus grande échelle !

      À propos des syndicats, il ne s’agit du « terme » syndicat, mais de leur réalité sociale : changer leur nom revient à se cacher derrière son petit doigt. C’est bien cette institution-là qu’il faut réformer, parce que c’est elle qui se trouve au lieu stratégique, et névralgique, d’une possible maîtrise solidaire du système social.
      Ils sont ceux qui peuvent animer la solidarité individuelle-collective, ou collective-individuelle… Pour un développement de cette analyse, lire ma chronique : la-solidarite-collective-est-individuelle

      Bien-sûr que les syndicats, aujourd’hui, ne correspondent pas à ce qu’ils devraient être pour résoudre le problème essentiel de notre société : c’est bien la raison pour laquelle ce sont eux qu’il faut réformer !
      Mais j’estime que la critique si sévère des syndicats est injuste, et inadéquate : en effet, ils sont dans le système social tel qu’il est, – grégaire – et ils ne peuvent eux-mêmes le changer ; ce sont les politiques qui ont le pouvoir et la légitimité démocratique pour le faire… et qui ne le font pas.

      Pour conclure, j’affirme encore une fois, que le problème ne réside pas dans le système économique, mais dans le système social, c’est donc celui-ci qu’il faut réformer.

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      1. Bonjour Jean-Pierre,

        En fait, je pensais surtout aux échelles plus petites. Parce que je pense qu’il est plus facile de faire bouger les choses à l’échelle d’un petit territoire.
        De plus, les pays ont instauré une certaine dose de participation ; ça me donne de l’espoir de voir que les démarches participative aient le vent en poupe.

        Mais vous parlez d’une société à construire alors que je parle d’espoir existant. Comme vous l’avez souligné dans votre réponse, les différentes échelles sont en rapport avec le temps d’action dont on parle.

        Sinon, je comprends bien votre argumentaire sur l’utilisation du terme « syndicat ». Mais en faisant partager votre analyse économique/sociale à des amis et vos propositions, j’ai pu constater qu’eux aussi mettaient du temps à comprendre le changement de fond derrière l’utilisation de ce mot connoté.
        En tout état de cause, vos propositions font débat passionné…après le choc de la surprise et les nécessaires efforts de gymnastique intellectuelle 🙂

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      2. Désolé de vous décevoir, mais votre espoir de changer les choses au niveau local est voué à l’échec ;
        En effet pour instaurer « la solidarité collective », il faut prendre en compte tout ce collectif, l’ensemble de ce collectif… alors que localement vous ne le pouvez pas : localement vous ne pourrez qu’instaurer une solidarité grégaire, d’un petit groupe… c’est le système actuel.

        Or je le redis, il s’agit de substituer la solidarité collective à la solidarité grégaire.

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  4. Je regrette qu’il n’y ait pas de proposition sur la nature de l’entreprise, car l’articulation salariat/entreprise est oubliée ? on voit bien que l’ hyperconcentration monopolistique de l’entreprise(voir Nestlé ou Unilever) contrairement à ce qui est tjrs affirmé ne fait plus baisser les prix bien au contraire, qui plus est n’est pas créateur d’emplois(automatisation à outrance) mais la valeur elle, résultante du process de production n’est plus accaparé que par un petit nombre et je dirais tjrs les mêmes!!!

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    1. Bonjour juillard,

      comme vous avez pu le constater, je ne me suis pas occupé d’économie, je me suis contenté de réformer le système social à travers le salariat pour qu’il puisse à la fois :
      – avoir le pouvoir d’assumer et d’animer la solidarité collective,
      – avoir le pouvoir, l’influence, pour imposer le point de vue de l’intérêt collectif, aussi bien vis à vis de l’État central ou territorial, que vis à vis des pouvoirs économiques, entreprises, actionnaires, investisseurs… que d’ailleurs aussi des salariés.
      – prendre la responsabilité économique, mais seulement d’un point de vue collectif (au contraire de la situation présente où les salariés-syndicalistes se contentent de revendiquer des avantages)

      À mon avis, le problème que vous soulevez sera résolu par la capacité d’influence que les syndicats auront acquise, pour faire valoir leur point de vue sur l’emploi.

      Essayer d’imaginer l’immense capacité d’initiative qu’auraient les syndicats dans ce système…

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  5. Bonsoir,

    Fascinant ! Toute la partie analyse est l’une des plus claire et des plus consises qu’il m’ait été donné de lire. Sur la partie solution, beaucoup de bien aussi. En particulier sur la notion de salariat « mineur » en position de demande et de la nécessité d’un salariat « majeur ».

    Le parlement « salarié » remplaçant notre inutile sénat … bien vu. Encore qu’il faudrait me semble-il réserver une place aux patrons et aux indépendants ainsi qu’à certains experts sectoriels (envrionnement, énergie, télécom, éducation).

    En revanche, sur la partie solution, je vois plusieurs failles :

    1/ Les ressources limitées

    Le texte présuppose silencieusement qu’une croissance infinie est possible :

    « L’augmentation de la production permettant l’élévation du niveau de vie, cette élévation fait pression sur les conditions de travail et de rémunération des salariés ; d’autant plus que de leur rémunération dépend la consommation qui détermine pour une part la demande, qui permet la production, etc.. »

    Or les situations de pénuries créent inévitablement des comportements grégaires. L’exemple plus marquant est la pénurie de terrain constructible dans les villes qui engendre une augmention continue des prix immobiliers => augmentation des dépenses incompressibles => passage en mode survie => pas le temps de participer aux instances syndicales que vous appelez des vos voeux.

    Il faudrait donc y ajouter une « gestion » des ressources primaires (eau, air, territoire) des attentes et de la natalité … sans verser dans l’eugénisme ! Sujet délicat s’il en est …

    2/ Le vieillissement de la population

    Le texte semble se baser sur le fait que la pyramide des ages est favorable. Or ce n’est pas le cas dans beaucoup de sociétés Européeenes.

    Ce vieillissement engendre un double phénomène : incapacité à se « prendre en charge » et donc à devenir ou rester « majeur » et demande accrue de protection.

    3/ Les indépendants

    Votre texte dépeint une société essentiellement salariées. Point de place (ou très peu) donc pour le boucher du coin, le boulanger. Dans toutes société, il y aura toujours une frange non négligeable d’individus actifs qui ne souhaient pas rentrer dans une relation de patron à salarié. Aucune différence dans votre propos entre la toute petite entreprise et l’entreprise disons de 10 salariées ou plus qui a vocation à grandir. Je pense sincèrement qu’il y a deux mentalités très differentes à l’oeuvre dans chacun des ces cas et qu’il ne faut pas en rejeter une comme vous le faites … par omission.

    4/ La simplification de la vie

    Pas excès de prudence ou par passion malsaine, nous avons introduit beaucoup de bureaucracie, de règles qui nous font perdre à tous beaucoup d’énergie au lieu de se concentrer sur la production. Il faudrait inventer un « anti-parlement » dont l’unique rôle serait re vérifier l’applicabilité des lois et de règlements et dont l’unique pouvoir serait l’abrogation ou la simplification.

    4/ La nécessaire bienveillance

    C’est le point le plus important.

    Vous supposez à mon avis à tort, que l’ensemble des « syndicats » seront des organisations bienveillantes qui ne se feront pas concurrence pour capter le plus de salariés possible, en faisant des promesse démagogiques. En leur donnant plus de rôle, vous ne faites que déplacer le problème du politique vers le syndical.

    Personnellement, je pense qu’il n’y a pas de solution simple à ce problème de pouvoir. Si l’on tire la pelote de fil du raisonnement, on en arrive à considerer l’individu et sa capacité de bienveillance.

    Il faut réhabiliter toutes les formes d’apprentissage moral ou d’entraînement à la bienveillance et à l’honnêteté, au don de soi pour les autres. Cela touche à la spiritualité, à la religion ou à la morale laïque. Cela se retrouve dans le scoutisme. Cela se retrouve dans le bouddhisme.

    Je me demande dans quelle mesure l’approche américaine de permettre à la presse d’enquêter sur la vie des gens qui aspirent aux responsabilités publiques n’est finalement pas saine. Au moment de choisir les « chefs » de ces bienveillants et puissants syndicats, ne faudrait-il pas que les adhérents sache à qui ils ont à faire ?

    Merci en tout cas pour votre texte lumineux.

    Emmanuel

    DISCLAIMER : pour être transparent à la mode anglo saxone. Je suis actif dans un mouvement scout bouddhiste, les éclaireurs de la nature. http://www.edln.org/

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    1. Je vous remercie Emmanuel,

      voici des réponses sur chaque point :

      Tout d’abord, je rappelle que je distingue radicalement les instances : sociale, économique, politique… comme je distingue la décision individuelle du chef d’entreprise soumis à la concurrence, de la décision collective salariale-syndicale sur laquelle repose la solidarité collective qui est le fondement de ma réforme.
      Chaque instance doit rester à sa place : il n’est donc pas question que le parlement «salarié»(social) remplace le Sénat (politique).
      D’autant plus que l’instance salariale-sociale reste sous le contrôle politique : donc pas de confusion entre les instances.

      Il me semble que vous oubliez le 3° point de ma réforme : La création d’entreprises et la formation des chefs d’entreprises par les syndicats.
      J’ajoute un point que je n’ai pas développé : Étant donné que dans une carrière professionnelle, on peut passer du statut de salarié à celui d’entrepreneur, puis de nouveau salarié et à nouveau entrepreneur… je pense que les syndicats doivent être en charge de ces changements : il y a à certain moment des secteurs d’activités qui disparaissent, les actifs de ces secteurs perdent leur emploi, j’estime qu’il appartient aux syndicats d’anticiper ces mutations et de se charger d’accompagner ces actifs aussi bien les salariés que les entrepreneurs…
      Ce qui signifie que les syndicats doivent être en charge de l’ensemble de l’activité sur tout le territoire, mais exclusivement sous l’aspect collectif.

      1/ Les ressources limitées : je pense au contraire que la solidarité collective mise en œuvre évitera le recours à la croissance dans une course poursuite-fuite en avant…

      2/ Vieillissement de la population : au contraire, cette solidarité collective de l’emploi permettra d’adapter chaque emploi à chaque salarié selon les possibilités de son âge, de sa énergie, de son désir… La solidarité collective permettrait d’organiser la prise en charge des plus faibles avec la moindre charge de travail…

      3/ Les indépendants : j’ai déjà répondu plus haut…

      4/ La simplification de la vie : vous voulez simplifier, et vous ajoutez un Parlement de plus !! La bureaucratie est effectivement un problème, actuellement elle est étatique ; la question restera posée avec les syndicats… et à résoudre.

      4/ La nécessaire bienveillance.

      Je ne suppose pas que l’ensemble des syndicats seront naturellement des organisations bienveillantes, mais il faut comprendre le changement que j’introduis :
      Actuellement les syndicats défendent les intérêts des salariés dans chaque entreprise ; or cet intérêt-là s’oppose à l’intérêt collectif de TOUS les salariés : si les syndicats veulent défendre l’intérêt collectif de tous les salariés, ils doivent abandonner l’intérêt «grégaire» des salariés de cette entreprise-là… et ils passent pour des traitres. L’intérêt grégaire est un intérêt particulier partagé par certains, à l’exclusion des autres.
      En proposant de mettre l’intérêt COLLECTIF des salariés au premier plan, en prenant l’intérêt individuel de chaque salarié dans sa démarche personnelle, je légitime les syndicats dans cette démarche, et je délégitime donc la défense de l’intérêt grégaire des salariés.

      Ma proposition change donc la légitimité de l’action syndicale : elle exige que les syndicats prennent en charge l’intérêt individuel de chaque salarié, et ainsi, par cette prise en charge individuelle, ils prennent en charge l’intérêt collectif de tous les salariés, et au delà, de toute la société.
      J’insiste : le collectif est individuel ; il n’est pas grégaire.
      Ma chronique : http://jpajuzan.blog.lemonde.fr/2011/11/02/la-solidarite-collective-est-individuelle/

      J’insiste encore, le suffrage universel doit être exclusivement réservé aux instances politiques, qui contrôlent toutes les autres instances.

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  6. Je salue la réflexion engagée. Elle a le mérite d’etre poussée et de susciter une analyse de fond de toutes ses composantes pour essayer d’imaginer le système que vous présentez dans son ensemble, gymnastique intellectuelle très plaisante.

    Pour cette raison j’aurai voulu tenter d’en faire une critique la plus complète possible mais au fur et à mesure de la lecture les points son trop nombreux à traiter pour ne pas en faire des pages interminables. La taxe d’ancienneté est la seule qui m’a parue présenter une idée intéressante au premier regard, sauf que l’ancienneté relève avant tout de l’entreprise afin de fidéliser ses salariés à des postes souvent stratégiques, avant de l’etre pour tous grace aux conventions collectives.

    Il n’est pas dans l’intéret de l’Economie d’élaborer un turn over institutionalisé. Les conséquences sont simples. Les entreprises metteront moins de budgets et de temps de formations et donc pousseront leurs exigences encore plus accrues pour acquérir des salariés clés en mains. Le « jeunisme » salarial tendra de la meme manière à limiter les évolutions internes à moins de s’engager dans un bric a brac bureaucratique pour prendre cela aussi en considération par vos syndicats, tout comme il limitera les investissements des PME qui nécessitent souvent cette expertise interne et transversale de longue durée.

    Concernant le système proposé en lui meme, on constate tout d’abord le Syndicat partout, en somme vous proposez une syndicratie ou pour etre plus précis en terme de sciences politiques, un système anarcho –syndicaliste.

    Vous voulez remplacer l’omnipotence de l’Etat coercitif, par un autre organe devenant cette fois omnipotent et omniscient, car capable de déterminer les investissements futures de la société et les qualités et « intérets » de chaque individu pour les mettre dans les bonnes cases économiques.

    Que de visionnaires (de Dieux), il faudra à la tete de vos syndicats pour qu’ils puissent diriger les créatifs et les entrepreneurs dans la bonne direction collective…Et que de monde pour diriger nos vies….

    Pour conclure.

    Vous partez en fait d’une erreur fondamentale de départ, presque métaphysique, en considérant le salarié (citoyen potentiel) comme une force entièrement cohérente dans ses besoins et ses volontés.

    En vérité, ce qu’il est plus judicieux d’appeler le CSCE (Citoyen-Salarié-Consommateur-Epargnant) est un système permanent de contradictions et de volontés qui s’opposent a l’intèrieur d’un meme individu, ou certaines volontés prennent le pas sur les autres en fonction de différentes situations, pour se diriger souvent à une decision de compromis, si ce n’est tout aussi souvent a une phase d’équilibre soumise à nos passions dans un espace de temps donné.

    Exemple : On craque en tant que consommateur sur la grosse télé hors budget à l’instant T en sachant le besoin de faire plus tard le sacrifice de l’épargne ou de travail supplémentaire.

    Que cette confrontation “primaire” (grégaire) de l’individu vis a vis de lui meme soit remise au sein d’organisations collectives est déjà l’assurance de conserver cet individu en tant que “mineur” et d’engendrer exponentiellement ces divisions dans la société.

    Je ne partirai pas donc sans propositions, en tant que spécialiste (philosophe) en sciences politiques. Une juste et durable répartition des richesses est une conséquence naturelle d’une juste répartition des pouvoirs. Donnez le Pouvoir a chaque composante de l’individu et vous verrez ainsi les inegalités s’atténuer naturellement.
    Nous ne possédons que celui du Consommateur pour le moment…
    Le premier à conquérir est celui du Citoyen, le Pouvoir Politique, Législatif.

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    1. Bonjour,

      vous vous dites philosophe, et ça ne m’étonne pas !
      Vos propositions ne résolvent strictement rien puisqu’elles confirment l’état actuel des rapports société-économie-État, avec la précarité croissante des salariés inhérente à cette structuration institutionnelle.
      Mon souci principal est la précarité croissante inexorable des salariés qui va devenir de plus en plus dramatique : vous ne vous en souciez pas !

      Votre analyse est philosophique en ce qu’elle porte sur «l’être»… individu ou salarié : je n’en ai rien à faire !
      Mon analyse et ma proposition portent sur l’évolution historique du statut social de l’individu, et les sécurités qui lui était dévolues.
      Les relations sociales sont déterminées par le statut des agents sociaux : ce sont les droits évolutifs contenus dans ces statuts que j’analyse dans leur évolution historique, pour trouver une réponse contemporaine à la précarité que cette évolution provoque. On vit actuellement dans cette absurdité :
      -On devient de plus en plus précaires, tout en devenant de plus en plus riches !!!-

      «Il n’est pas dans l’intérêt de l’Économie d’élaborer un turn over institutionnalisé» dites-vous : mais mon projet n’est pas de soumettre le social à l’économie ; au contraire, il s’agit pour moi, de soumettre l’économie au social, de la contraindre de produire au profit de la société, des gens, des salariés, de nous tous…
      Pour ce faire j’essaie d’articuler la nécessaire liberté des entreprises, à la nécessaire sécurité de l’emploi des salariés, en même temps que leur liberté.

      On peut se demander si m’avait lu ; en fait vous me lisez avec vos aprioris philosophiques, incapable que vous êtes d’en sortir.
      Vous dites : «on constate le Syndicat partout» : pourtant je parle, moi, DES syndicats… qui remplissent des fonctions, des tâches ; alors que vous, en philosophe, vous l’essentialisez, vous en faites «l’être Syndicat», avec un S majuscule !
      Vous restez enfermé dans votre vision philosophique. La philosophie est stérile.
      Ce n’est pas la philosophie qui est le moteur de l’Histoire, elle n’en est que la «mouche du côche».

      Non, le moteur de l’Histoire, c’est l’évolution sociale, l’évolution des différents statuts sociaux qui permettent l’évolution des rapports sociaux ; et mon analyse et ma proposition consistent à adapter les structures à la fois sociales, économiques et étatiques, au stade de cette évolution historique, pour que leurs rapports soient efficients et répondent aux nécessités de l’époque.

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  7. EFFRAYANT !!!!

    la mainmise syndicale sur le dispositif ne me parait pas une innovation…

    il y a belle lurette que les représentants des citoyens ont perdu leurs âmes.. et le plus souvent malgré eux… par facilité…
    il y a belle lurette que les présumés représentants des salariés ont perdu leurs légitimités… et le plus souvent volontairement pour défendre leur idéologie plutôt que l’emploi… le premier acquis du salarié…

    Alors, même si vous parlez d’un syndicalisme honnête et intelligent (pluriel aussi) – a inventer car il n’existe pas aujourd’hui… combien de temps lui donnez vous pour se prendre au jeu du pouvoir pour le pouvoir…. des luttes d’égo et de puissance… hélas dans la nature humaine…

    La solution est assurément dans l’initiative, l’indépendance, le libéralisme entrepreneurial … sécurisé par plus de transparence ( sur le turn over en particulier) et par une sécurisation mutualisée basé sur l’incitation à le formation continue, l’accompagnement financier et social à la mobilité vers des bassins ou des filières d’emplois plus en besoin.( financer par une surcotisation contrat courts)… un contrat d’actif unique, valable quelques soit le statut actuel, avec les même droits et devoirs, les mêmes cotisations, facilitant les parcours multiples, les aller retour entre salariat et entreprenariat…
    Pas de quitter un modèle ultra administré, véritable bastion des carcans établis, pour une autre forme de monstre décidant de tout pour tous…

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    1. Effrayant ? Vraiment ?

      Votre effroi est sélectif : vous vous effrayez d’un futur syndical hypothétique et fantasmatique, mais vous ne vous effrayez pas du tout du malheur actuel, présent, des précaires d’aujourd’hui. Vous ne vous effrayez pas de la déréliction dans laquelle ils vivent, de l’absence d’espoir à laquelle leurs conditions de vie les condamnent, vous ne vous effrayez pas de l’aggravation certaine de ces conditions de vie…
      Vous préférez vous bercer d’illusions qui ne vous engagent à rien.

      Vous préférez vous en remettre à «l’initiative, l’indépendance, le libéralisme entrepreneurial…», en oubliant volontiers que les entreprises embauchent les salariés dont elles ont besoin, et nuls autres ; les entreprises ne sont intéressées, et ne peuvent être intéressées que par leur intérêt propre, et ne peuvent être intéressées par les salariés que dans la mesure où ils entrent dans cet intérêt propre…
      Que «la transparence, la sécurisation mutualisée» demeurent des vœux pieux sans aucun commencement de réalisation possible, ne vous dérange pas.

      Vous prétendez qu’il revient aux employeurs de défendre les intérêts des salariés, mais qu’il est «effrayant» qu’ils se chargent eux-mêmes de leur intérêt, collectivement.

      Effectivement, les syndicats actuellement défendent les avantages acquis des salariés qui les ont acquis, et ne défendent pas les précaires : mais ce n’est pas en raison de leur «immoralité», ou de n’importe quelle déviance, mais parce que l’institution actuelle syndicale est structurellement bâtie pour défendre les avantages acquis des salariés qui les ont acquis, il ne leur est pas possible de faire autrement !
      À part ça, les syndicalistes sont comme tout le monde, ni plus ni moins vertueux que d’autres.

      C’est l’institution qu’il faut réformer.
      Il faut la réformer pour qu’elle réponde à l’évolution fondamentale de l’individualisation de la société, dans laquelle les individus perdent la protection -grégaire- qui perdurait encore, et qui les laisse de plus en plus isolés.

      Je propose que ce soit les salariés eux-mêmes qui soient responsables de leur emploi, de la sécurité de leur emploi, de la qualité de leur emploi… par l’institution de la solidarité collective salariale et sociale dynamique.

      Et ceci sous le contrôle strict de l’État, et de ses organismes de contrôle ; les syndicats n’auraient aucun moyen de légiférer, seraient responsables de l’état de la condition salariale, et devraient rendre des comptes… alors qu’aujourd’hui c’est toujours la faute des autres : le patronat, l’État, la finance, le capitalisme… mais jamais la leur !

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  8. L’analyse comporte certain points intéressants quant au fonctionnement de nos sociétés capitalistes : la subordination du salariat au patronat, sa dispersion voire son éclatement ainsi que les carences des états vis à vis de certains salariés…. De fait, elle donne parfois l’impression de sortir du cadre généralement servi par les médias.

    Mais la séparation artificielle entre l’économique et le social de même que les solutions préconisées laissent planer le doute sur la volonté de l’auteur de voir un jour les salariés réellement émancipés. De plus, il admet qu’ils contribuent de manière déterminante à la création de richesses mais ne remet jamais en cause le profit.

    Ainsi, on voit se profiler un retour aux journaliers errant misérablement de ville en ville ou de pays en pays pour trouver un travail. Cette nécessaire précarité qui serait confondue avec mobilité et liberté, aurait la bénédiction d’un nouvel ordre mondial…. Il est à se demander si internet n’existe pas pour faire passer certains lobbys….

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    1. Je me demande si vous avez réellement lu le texte…
      D’autre part, le profit mesure l’efficacité de l’investissement : si vous supprimez le profit, comment mesurerez-vous cette efficacité ?
      Vous restez enfermée dans certains préjugés, et chaque fois qu’on a supprimé le profit cela a conduit à l’effondrement économique, qui lui-même a conduit à l’effondrement social.
      Si finalement, ces idées ne se sont jamais établies démocratiquement, c’est que les citoyens-électeurs n’en ont pas voulu : ils ne sont pas fous !

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  9. salariat = prolétariat. Point barre.
    Comme c’est étrange, tout semble être fait pour que le second terme soit oublié. Pourquoi ? Mystère.
    Pour votre part, vous avez réussi à ne pas le placer une seule fois dans votre texte. C’est très très fort.

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    1. salariat = prolétariat…
      Et les traders par exemple, ce sont des salariés : sont-ils des prolétaires ?
      Il y a des salariés qui sont des privilégiés, il y en a d’autres dont le salaire ne leur permet pas de vivre.
      Nombre de dirigeants d’entreprises le sont en tant que salariés, sont-ils des prolétaires ?

      Le terme de prolétariat relève d’une conception du monde avec des boucs émissaires responsables-coupables de tout : c’est une conception sacrificielle, qui croit qu’en supprimant les profiteurs-exploiteurs on résout les problèmes des « prolétaires ».
      Or, toutes les expériences qui ont tenté d’agir sur ces bases ont toutes échoué et ont aggravé la situation de ces « prolétaires ».

      L’idée de prolétariat est une idée fausse qui empêche d’envisager les véritables solutions efficaces.
      On dirait que n’avez lu mon texte que pour rechercher la confirmation, ou la réfutation, de votre préjugé.

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  10. Une société adulte, autonome, responsable, j’en rêve moi aussi, ou je l’imagine, comme vous préférez.
    Il me manque encore le mode d’emploi.
    Le but à atteindre est clair, vous l’avez décrit on ne peut mieux; le chemin reste à trouver, le comment, y avez vous réfléchi ? Veuillez excuser les omissions que j’aurais pu faire par ignorance, je n’ai pas encore tout parcouru, loin s’en faut !
    En écrivant « Les treize règles d’or du tuteur aimant », j’ai fait un pas dans cette direction, espérant contaminer les autres parents et amener plus d’autonomie à la génération future.
    En militant pour un syndicat Solidaire, qui défend aussi les précaires (et il y en a, dans les entreprises, privées mais publiques aussi, ô combien ! ) comme les contractuels que l’Etat vient d’obliger réglementairement à lourder au bout de deux ans de bons et loyaux services, tout bien formés et motivés, pour les remplacer par de la « matière première » toute neuve et fragile…
    Le pouvoir est bien accroché à ses branches, c’est pourquoi je rejoindrais parfois « matild », qui propose de commencer localement, pour que l’ensemble des petites initiatives oblige finalement les dirigeants à écouter.
    On le voit déjà, les ZAD, les Anonymous, les lanceurs d’alerte, les médias indépendants etc sont autant de mouches du coche, à partir de combien arrivera-t’on à dévier le cocher ?
    Sincère respect pour votre travail.

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